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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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7 mai 1839

7 mai [1839], mardi matin, 11 h. ¼

Bonjour, mon cher petit bijou d’homme, comment allez-vous ? Je ne devine pas ce qui a pu vous empêcher de venir ce matin, car en supposant que vous ayez travaillé toute la nuit, ce qui est sûr, il y a toujours un moment de repos et c’est sur lui que je comptais pour me rabibocher de plusieurs semaines de jeûne. J’ai mal calculé mon affaire et j’en suis pour mes frais d’impatience et d’amour.
Il fait bien beau, mon Toto, et quoique j’aie les pieds tous remplis d’ampoules, je ferais bien le tour de la colline avec vous si vous voulez m’y conduire. Mais je ne veux pas retourner de longtemps chez la mère Pierceau. Je trouve absurde les humeurs et les grimaces qu’elle fait depuis quelque temps quand je suis là. D’ailleurs j’ai mes chemises à faire et mes zaillons à raccommodera. Jour Toto. Jour, mon petit o. Suzanne est ravie de sa soirée d’hier, elle s’est encore plus amusée que la première fois et elle adore le CAPITAINE César [1] jusqu’à en rêver. Moi j’en fais autant pour vous, ce qui constitue une maison bien [illis.].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 135-136
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « racommoder ».


7 mai [1839], mardi soir, 7 h. ½

Je travaille comme un petit âne et vous comme un gros cheval ; à nous deux, nous avons l’air de deux bêtes de somme. Mais je voudrais tirer la voiture à moi toute seulea et vous laisser le bon temps [Dessinb]. Malheureusement, les coups de fouet de la nécessité pleuvent en plein sur vous tandis que moi je suis en arbalète et je regarde passer mélancoliquement les Juju et les Toto sur les impériales des diligences dans les grandes routes et ailleurs quandc il y en a. C’est ce qui me donne cet air intéressant et philosophe que vous avez souvent remarqué. Je vous aime, Toto. Vous saurez cela pour votre gouverne. Je ne sais pas si vous allez ruer ce soir (pour continuer la métaphore) mais je me suis lancée dans une dépense de ruban de veloursd à dix sous l’aune pour requinquer mon mantelet, vue l’absence complètef de dentelle et il en faut 8 aunes et demie !!!!!g Ô prodige de la chimie !!!! Tu n’es rien à côté de cela car si je parviens à faire un mantelet PORTABLE de ce haillon, je compte ouvrir un cours à la clinique Orfila ou or phi la qui n’aura jamais de sa vie ni de ses morts rien vu de plus surprenant. En attendant, il paraît que j’en suis pour mes frais d’exactitude et de toilette et que je dois rester dans ma cage indéfiniment ?

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 137-138
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « tout seul »
b) Dessin :

© Bibliothèque Nationale de France

c) « Quant ».
d) « velour ».
e) « vue ».
f) « complette ».
g) Les 5 points d’exclamation courent jusqu’à la fin de la ligne.

Notes

[1Personnage de Ruy Blas.

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