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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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22 février [1841], lundi matin, 11 h. ¼

Bonjour mon Toto chéri, bonjour mon amour, bonjour mon adoré. Comment vas-tu, mon bon petit homme ? M’aimes-tu ? Penses-tu à moi ? Me désires-tu et viendras-tu bientôt ? Je t’aime moi, je pense à toi, je te désire, je t’attends et je t’adore.
Il fait assez vilain temps ce matin, mon pauvre amour, peut-être en l’honneur de la sortie forcée que nous sommes obligés de faire aujourd’hui. C’est une attention délicate du soleil de se cacher les jours bien rares où je pourrais le regarder avec vous. Il craint peut-être la comparaison que je pourrais faire entre lui et vous, alors je n’ai rien à dire et sa modestie me plaît. Taisez-vous, vous, je vous défends d’être modeste, mais je vous prie de m’aimer. Sur ce, baisez-moi et aimez-moi de toutes vos forces si vous pouvez.
C’est aujourd’hui que nous reconduisons Claire, mon Toto, il faut tâcher que ce soit d’assez bonne heure pour qu’elle ne perde pas sa leçon de piano. Je t’écris cela à présent comme si tu pouvais le lire tout de suite et hâter ton retour. C’est une illusion dont je ne peux pas me défendre que de croire que ce que je t’écris le matin dans mon lit, tu le vois et tu l’entends de l’endroit où tu es. C’est pour cela que je te dis tous les jours que je t’aime, que je te désire et que je t’adore. M’entends-tu ?

Juliette

BnF, Mss, NAF 16344, f. 171-172
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette


22 février [1841], lundi soir, 8 h.

J’ai retrouvé mon bouton, mon cher bien-aimé, entre mon corset et ma chemise. C’est un hasard fort heureux qu’il ne se soit pas définitivement perdu dans le trajet que nous avons fait aujourd’hui. Je t’aime mon adoré bien-aimé, je t’aime mon Toto chéri. J’aurais donné tout au monde, mon Toto, pour passer le reste de la soirée avec toi mais je sais, mon pauvre petit homme, que tu ne pouvais pas me donner ce bonheur, dans ce moment-ci surtout où tu es accablé d’affaires de travail et d’ennuis de toutes sortes. Je sais cela, mon adoré, et je ne t’en veux pas d’avoir résisté à mon envie. Au reste, quels que soienta le jour et l’heure où tu pourras me donner le bonheur que je te demandais avec tant d’instance tantôt, tu me trouveras toujours aussi affamée, aussi empressée et aussi comblée que je l’aurais été aujourd’hui si tu avais pu me satisfaire. C’est à toi à ne pas me faire languir trop longtemps. Demain MARDI GRAS est aussi un jour anniversaire, autant que le 17 février [1]. Si tu pouvais me donner la plus petite culotte en son honneur, je serais trop heureuse mais je n’y compte pas. Mon pauvre bien-aimé, nous voici encore une fois sans un sou, le vinaigre et l’épicerie ont pris le reste des [500/800 F ?] mais le diable n’entamerait pas une seule parcelle de mon amour pour toi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16344, f. 173-174
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

a) « quelque soit ».

Notes

[1Juliette Drouet et Victor Hugo célèbrent deux anniversaires : leur première nuit, du 16 au 17 février 1833, et le mardi-gras qui suivit, où le poète renonça à aller à un bal d’actrices pour passer avec Juliette une nuit qu’il évoquera ultérieurement avec émotion.

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