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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 juilleta [1836], samedi matin, 9 h.

Bonjour cher adoré, bonjour mon bien-aimé. Je te demande mille fois pardon pour toutes les bêtises que je t’ai écrites ces deux jours-ci. Je t’aime trop vois-tu, c’est ce qui me rend encore plus méchante et plus stupide que je ne le suis naturellement. Je t’aime bien plus que je ne peux te le dire, bien plus que tu ne peux le savoir. Cependant quand je regarde ce que je suis et ce que tu es, quand je pense à ton entourage je ne peux pas m’empêcher d’être saisie de crainte et de soupçon, c’est ce qui rend ma vie si triste quelquefois. Mais quand tu viens avec ta belle figure, avec tes bonnes paroles, me sourire et me rassurer, je suis au ciel, je n’ai plus peur du tout et je suis aussi heureuse en une minute que j’ai été malheureuse en une journée. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre mais tu dois être habitué à me deviner. Mes lettres à moi pauvre ignorante ne sont tout au plus que des espèces de pantomimes dont l’esprit est dans toi et le sentiment dans mon âme.
Je t’aime mon TOTO, je te le crie bien fort pour que tu m’entendes de chez toi. J’ai toujours avec moi le petit mouchoir de ta ceinture, je ne me suis servie que de celui-là depuis avant-hier, il sent toujours très bon.

Juliette

BNF, Mss, NAF 16327, f. 170-171
Transcription de Nicole Savy

a) Juliette date cette lettre par erreur du samedi 24 juillet. Le 4 est surmonté d’un 3 qui ne semble pas de sa main.


23 juilleta [1836], samedi soir, 10 h. 10 m.

Mon pauvre cher adoré vous venez de me quitter et déjà j’ai le cœur triste et impatient comme si je ne vous avais pas vu depuis la semaine passée. C’est que je vous aime mon Toto, je vous aime même beaucoup trop pour ce monde. Vous m’avez demandé en me quittant si je n’avais rien à faire, de l’autre côté je vous ai répondu sans penser que je n’avais pas ma chemise de nuit ni mon oreiller. Au reste comme je ne veux pas vous turlupiner sans raison je me passerai d’oreiller et je garderai ma chemise de jour.
Pauvre cher petit homme fatigué et estropié, je vous aime de tout mon cœur et je vous plains de toute mon âme. Si vous venez cette nuit je panseraib votre petit pied avec mes grosses lèvres et tout sera guéri d’un coup.
Cher bien-aimé je pensais avec effroi tout à l’heure, lorsque tu me racontais le duel de ces deux hommes, que tu pouvais toi aussi te trouver pris à cet affreux piège, et je fais des vœux pour que jamais pareil malheur ne t’arrive car je serais capable d’en devenir folle sur la place. Pauvre bien-aimé tu ne sais pas combien tu es ma vie, ma joie, mon souffle et mon bonheur. Je ne pourrais plus vivre sans toi.

>J.

BNF, Mss, NAF 16327, f. 172-173
Transcription de Nicole Savy

a) Juliette date cette lettre par erreur du samedi 24 juillet. Le 4 est surmonté d’un 3 qui ne semble pas de sa main.
b) « penserai ».

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