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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 24 octobre [18]63, samedi matin, 7 h.

Je suis plus matinale que vous, mon cher petit homme, et le soleil aussi. Cela ne nous arrive pas souvent à l’un et à l’autre de vous devancer à la tâche aussi nous n’en sommes que plus fiers quand cela nous arrive. Je dis : NOUS, le soleil et moi, l’un portant l’autre. Cette familiarité ne lui déplaît pas, j’en suis sûre, car il sait que je vous TUTOIE quand c’est mon bon plaisir. Ah ça ! tout cela ne me dit pas comment tu te portes ce matin. J’espère que tout est selon le vœu de mon cœur et je m’en réjouis avec confiance. Je n’ai pas voulu contester hier devant Mme Chenay pour la copie, sentant que ma prétention d’écrivaine pourrait paraître excessive puisque je ne pouvais montrer l’amour qui me justifie, mais au fond du cœur je suis triste. Je sens que petit à petit je m’[illis.] de ta vie et que je viendrai bientôt à n’être plus qu’une ombre gênante, un spectre ennuyeuxa que tu traîneras péniblement après toi. Je sens cela, mon pauvre bien-aimé, et je sens aussi que tu ne peux pas faire autrement et qu’il est juste que rien n’entrave ton œuvre, pas même mon amour avec ses exigencesb inopportunesc. Je me résigne, je t’aime, je t’adore.

J.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 234
Transcription de Gérard Pouchain

a) « ennuieux ».
b) « exigeances ».
c) « inoportunes ».

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