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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 16 octobre [18]63, vendredi matin, 7 h. ½

Bonjour, mon pauvre endolori, bonjour, comment va ta fluxion [1] ce matin ? As-tu pu un peu dormir, mon pauvre petit bien-aimé ? Je voudrais savoir comment tu te trouves ce matin et si la douleur vive d’hier au soir s’est un peu apaiséea. Mais je n’ose pas envoyer frapper à ta porte dans la crainte de te réveiller si tu dors ou de te déranger si tu travailles surtout n’étant pas convenu de rien hier au soir en nous quittant. Je crains que la remontrance très sévère, très directe et très méritée, malgré tes précautions oratoires, adressée aux citoyens Kesler et Guérin ne t’ait fait monter davantage encore le sang à la tête et n’ait contribué à te faire passer une mauvaise nuit. Tout cela me tourmente et m’attriste ce matin, mon pauvre adoré, et je ne peux pas trouver le plus petit mot pour rire à te dire, la pensée que tu souffres m’enlève toute philosophie et je ne suis plus bonne à rien. Il me semble que si j’étais auprès de toi je pourrais te soulager ; mais le petit respect humain qui nous sépare ne sert qu’à me décourager et à m’inquiéter davantage. Je persiste à croire qu’un bon bain de pied, bien sinapisé, t’aurait dégagé la tête et j’ai peur que ton hydrothérapie ne soit pas d’à propos ce matin. Dans tous les cas, mon cher petit bien-aimé, il serait bon de consulter Corbin qui peut peut-être te débarrasser instantanément avec une petite saignée locale de la gencive ou de la joue. Tu me tranquilliserais beaucoup en le faisant appeler ce matin et je t’en serais bien reconnaissante. Je ne peux pas te l’envoyer dire mais tu dois le deviner à distance, si les communications magnétiques existent tu dois sentir que je souffre à travers toi plus que si c’était mon état personnel et que tu es mon adoré.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 226
Transcription de Gérard Pouchain

a) « appaisée ».

Notes

[1« J’ai mal aux dents pour la première fois de ma vie depuis avant-hier. Plutôt aux gencives qu’aux dents. Souffrance à droite, fluxion à gauche. » (Agenda de Victor Hugo, 16 octobre)

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