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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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7 août 1863

Guernesey, 7 août [18]63, vendredi matin, 7 h. ¼

Bonjour, mon plus que bien-aimé, bonjour. Je suis contente si tu as passé une bonne nuit et heureuse si tu m’aimes. Tu parles quelquefoisa des esprits de tes rêves qui s’amusent à te taquiner pendant que tu dors. Que dirai-je donc moi des démons de mes jours qui me tourmentent en me faisant trop souvent dire le contraire de ce que je pense intérieurement ? Je souffre en songeant que tu peux t’y méprendre, ne fût-ce qu’une seconde, et je donnerais la moitié de ce qui me reste à vivre pour que l’autre moitié ne soit pas troublée par rien de triste et de troublé. Je t’aime, mon grand petit homme, je te vénère et je t’admire et je ne comprends comment cet amour qui me remplit le cœur et l’âme peut se traduire jamais en quelque chose d’offensant pour toi. Il faut croire que les mots qui sortent de la bouche à de certains moments se travestissent et affectent des sens monstrueux uniquement pour faire pitié au pauvre être qui les dit malgré lui et à celui qui les entend et s’en indigne. J’étais dans ce cas-là hier. Je t’en demande pardon comme d’un tort volontaire et je te supplie de me croire quand je te dis que tu es le meilleur, le plus généreux et le plus [illis.] des hommes. Le jour où je te dirais le contraire, c’est que je n’aurais plus ma raison ni mon cœur. Ce jour-là, mon pauvre adoré, tu auras à prendre soin d’une malheureuse folle [et  ?] et tu devras ajouter à tous ton amour pour moi la PITIÉ SUPRÊME [1] qu’on doit à la pauvre [illis.] enfermée dans la bête comme dans une prison de chair. Jusque-là, mon doux adoré, je t’aimerai en pleine connaissance de cause comme le plus [parfait  ?] des hommes.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 210
Transcription de Gérard Pouchain


a) « quelquesfois ».

Notes

[1La Pitié suprême, terminée le 1er janvier 1858, sera publiée en février 1879.

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