13 août 1882

Paris, 13 août 1882, dimanche matin, 9 h.

Je ne sais que penser de ta nuit, mon grand bien-aimé, car tu n’étais pas éveillé quand je t’ai quitté et que je ne t’ai pas entendu remuer^a de toute la nuit, même pendant le gros orage qui a éclaté à quatre heures du matin ; j’espère que tu as bien dormi et que tout est à souhait dans ta chère santé. En attendant que j’en sois sûre, je donne la volée à ma restitus d’hier et à celle d’aujourd’hui avec cette seule recommandation de ne s’arrêter qu’à la porte de ton cœur. Au moment de mettre ta lettre à Pezon à la poste je me suis ravisée, pensant que peut-être le facteur n’était pas tenu à faire son service dans le jardin des Tuileries. Dans le doute j’ai prié l’excellent Lesclide de me prêter son fils pour porter ton message en temps utile. Par la même occasion, si le cœur lui en dit, il pourra jouir du spectacle intéressant d’un homme aux prises avec des lions. Je ne sais pas encore si Mme Lockroy et tes petits-enfants dîneront^b ce soir ; mais j’en doute parce que telle n’est pas leur habitude. Je n’ai pas encore reçu de réponse ni de Vacquerie ni de Meurice pour l’anniversaire de la naissance de Georges mercredi prochain. Peut-être ne sont-ils plus à Paris. Cher adoré, quel que soit le nombre et la qualité des invités à la fête de ce jour béni entre tous, je sens que mon cœur y participera de toute la force de mon amour pour toi. Je t’admire, je te vénère et je t’adore.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16403, f. 143-144
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette

a) « remué ».
b) « dînerons ».