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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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20 février [1845], jeudi matin, 9 h. ¾

Bonjour, mon petit bien-aimé, bonjour, mon Toto adoré, bonjour, mon cher petit homme, doux, charmant et ravissant, bonjour, bonjour, je t’aime. Le serrurier a emporté la serrure du jardin. Dès que tu m’auras donné tes clefs, je les lui enverrai pour qu’il les arrange. Il faut espérer que cette fois elles iront. Du reste, ce ne sera pas sans peine, sans temps et sans impatience. Il est impossible d’éprouver plus de guignon, plus d’entraves et de petites contrariétés que je n’en ai éprouvésa depuis que j’ai mis le pied dans cette maison. J’attends que tu la désensorcelles par quelque acte MYSTÉRIEUX. Jusque-là, je n’y aurai pas de confiance.
Comment vas-tu, mon Toto ? Comment va ton cher petit ventre ? Si le bouillon et le raisin ne t’ont pas fait de mal, tu en auras encore ce soir. Mais, grand Dieu, quel temps de loup ! Il gèle de plus en plus, c’est à peine si je peux tenir ma plume pour t’écrire. Il est vrai que je suis sans feu. Quel chien de temps !
Dès que nous aurons déjeuné, j’enverrai Suzanne chez ton marchand de papier, non pas avec mon livre à cause des indications de toute sorte qu’il y a dessus et que je ne me soucie pas que le marchand et Suzanne voient, mais avec la date précise en leur faisant dire de regarder sur leur livre, à eux, la date correspondante. Mais je doute fort qu’il rende l’argent. En attendant, mon Victor, je t’aime et je te baise de toutes mes forces.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16358, f. 101-102
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « éprouvé ».


20 février [1845], jeudi soir, 5 h.

Cher ange de douceur et de bonté, laisse-moi t’adorer de loin puisque chaque fois que nous nous trouvons une minute ensemble, on dirait qu’il y a un malin diable qui s’amuse à nous susciter mille tracasseries dans lesquellesa je perds le peu de courage et de patience que j’ai, mais d’où tu sors toujours plus doux, plus charmant et plus aimé. Pour toi, ces petites infortunes domestiques sont autant d’occasions de montrer ton ineffable bonté et ta patience angélique. Pour moi, se sont de vraies calamités où je perds tout sang-froid et toute retenue. Je t’en demande pardon, mon bel ange, mais cela ne peut pas être autrement. D’abord parce que je suis femme, ensuite parce que je consacre toute ma patience et tout mon courage à supporter tes éternelles absences. Il ne me reste plus une seule goutte pour les autres affaires de la vie.
Ton papetier a redonné [3  ?] francs et rendu le papier d’hier en ajoutant que c’était la dernière fois qu’on te le vendait ce prix-làb, que, du reste, tu pourrais aller ailleurs et que tu n’en aurais pas à aussi bon marché que le leur, que c’était par égard pour l’erreur qu’il y avait euec l’année dernière sur le prix et pour la peine que Suzanne s’étaitd donnée qu’on faisait cette remise. Toujours est-il que [le  ?] voilà quitte à toi à te pourvoir ailleurs si tu le jugese à propos. Le serrurier a apporté la serrure. Il prétend qu’elle ira bien maintenant. Tu sauras cela ce soir. En attendant, je te baise et je t’adore comme un pauvre ange que tu es.

Juliette

Mme Guérard vient réclamer sa place pour le 27 [1]. Je la lui ai promise de nouveau, attendu que Claire ne pourra pas venir avec moi ce jour-là.

BnF, Mss, NAF 16358, f. 103-104
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « lesquels ».
b) « se prix-là ».
c) « avait eu ».
d) « c’était ».
e) « tu le juge ».

Notes

[1La cérémonie de réception de Sainte-Beuve à l’Académie française se déroule le 27 février 1845. C’est une séance publique. À cette occasion, Victor Hugo prononce un discours en réponse au discours de Sainte-Beuve.

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