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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 avril 1848

4 avril [1848], mardi après-midi, 3 h. ½

Je ne t’avais pas encore écrit, mon doux bien-aimé, quelque envie que j’en aie eu depuis ce matin mais mes douleurs étaient si vives et si atroces qu’il m’aurait été impossible d’essayer d’aucune diversion. Depuis cette pommadea je me sens bien calmée et j’en profite pour t’écrire toutes ces choses que tu sais déjà et qui ne gagnent pas en beauté ni en gracieuseté à être répétées. Décidément la maladie ne m’inspire rien de bien drôle ni de bien aimable et mieux vaudrait me taire et économiser le papier, la plume et l’encre pour une meilleure occasion. J’attends le médecin. J’espère qu’il me donnera enfin quelque chose qui agisse promptement sur la masse du sang. Justement le voici.
Je l’ai vu. Il n’est pas d’avis de prendre un bain et il n’ordonne pas la diète. Il est fâché que j’aie pris ce remède tantôt mais moi je ne le regrette pas parce que je me sens beaucoup mieux que ce matin. Du reste il ne viendra plus maintenant que dans huit jours, lundi prochain dans la soirée. Il espère dit-il me guérir, Dieu le veuille. Je ne m’y oppose pas au contraire. En attendant je traîne la jambe et je tire la langue comme un pauvre chien fatigué. Je t’aime, mon petit homme, je suis fatiguée, je suis souffrante, je suis triste, je suis bête, je suis agacée, je suis méchante et féroce mais surtout et malgré tout je t’adore.

Juliette

MVH, 8060
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « pomade ».


4 avril [1848], mardi, 5 h. du soir

J’espère que tu vas bientôt venir, mon petit homme, je le désire et je m’en fais d’avance une grosse joie. Il a fallu que je ne puisse remuer ni pied ni patte pour ne pas aller au-devant de toi. Mais si tantôt avait été à [présent  ?] j’y serais allée malgré les conséquences qui auraienta pu en résulter. Si je n’avais pas l’espoir que tu vas venir bientôt je serais furieuse de n’avoir pas passé outre les douleurs qui m’exaspéraient. Tâche de ne pas me les faire revenir en me faisant attendre trop longtemps, je crois que l’impatience et le désappointement est très contraire à ce genre d’indisposition. Aussi vous pourrez en prendre toute la responsabilité si vous ne vous dépêchez pas de venir aussitôt votre séance finie. Mon doux petit bien-aimé, je te promets de ne pas manger de la vie ni des jours si tu viens tout de suite. Je te promets de devenir mince et diaphane comme cette délicieuse vignette qui pour n’être pas anglaise n’en est que plus maigre et n’en a que plus de méritea. Si tu viens tout de suite je te rendrai tes trente-cinq sous en Bon du trésor. Je te chanterai ta romance, je te ferai des couplets pour les refrains. Enfin je te ferai une foule de choses plus chouettes les unes que les autres et je te dirai s’il a crié quand il m’a mordue [1]. Toujours si tu viens tout de suite.

Juliette

MVH, 8061
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) En travers de la page, Juliette Drouet a dessiné une femme très grande et très mince.

Notes

[1Citation à identifier.

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