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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 novembre [1847], mercredi matin 9 h. ½

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour, mon doux adoré, bonjour. Comment vas-tu ? Comment va ta pauvre petite caboche ? Je t’aime, mon Victor, je t’aime, je t’aime, je t’aime. J’ai rêvé de toi toute la nuit. Parmi les choses fantastiques du sommeil, il y en avait de très douces et de très significatives. C’est en allant de l’une à l’autre que j’ai passé la nuit. Je ne m’en plains pas puisque cela a prolongé en rêve le bonheur d’être avec toi. J’en avais besoin. Mon cœur, mon âme, tout mon être avait besoin de bonheur et le bon Dieu me l’a envoyé en rêve, ne voulant pas me le donner en réalité. Je l’en remercie et je m’en contente pour le moment. Aussi je te souris, mon adoré, je t’aime, je suis GEAIE, je suis contente, je suis heureuse et je te porte.
Je ne veux pas que tu te serves de ta clef encore aujourd’hui. Ce n’est pas de te reconduire ni de me coucher tard qui me fait quelque chose, c’est de t’attendre longtemps. Tu ne peux pas te figurer combien c’est long et pénible de rester tous les soirsa absolument seule jusqu’à minuit. La dernière heure surtout est un vrai supplice. Mais dès que je te vois tout est oublié. Je ne sens plus que la joie d’être avec toi et je passerais toute la nuit à te regarder pourvu que tu me parles. Ce soir je veux être encore ta conductrice et toujours ta pauvre vieille Juju.

MVH, α 8009
Transcription de Nicole Savy

a) « soir ».


24 novembre [1847], mercredi après-midi

Vous ne vous dépêchez pas encore beaucoup de venir, vieux chinois, et moi il y a déjà bien longtemps que je vous attends. Si vous croyez que c’est agréable pour LE MONDE, vous vous trompez fièrement. Dans tous les cas je commence à trouver que je vous ai déjà assez attendu comme cela et si vous ne venez pas bien vite je vous ficherai des coups.
Cher petit homme tu n’es pas souffrant n’est-ce pas ? J’ai toujours cette sourde inquiétude en moi qui redouble mon impatience et me fait trouver les heures encore plus mortellement ennuyeusesa. Il me semble que si je pouvais être absolument sûre de ta santé, de ton bonheur et de ton amour, j’aurais plus de courage à vivre loin de toi. Je ne peux pas assez te dire à quel point cette inquiétude me tient en tristesse et en irritabilité. Quand je touche avec la pensée à ce point douloureux de mon âme, tout mon être est secoué comme par l’électricité et je souffre de partout. Mon amour pour toi est d’une sensibilité telle que rien n’en peut donner une idée juste.
Mon Victor adoré, mon amour, mon sublime bien-aimé, je ne suis qu’amour et adoration depuis la tête jusqu’aux pieds. Il me semble que si j’étais transparente on me verrait de flamme. Je t’aime, je t’aime, je t’aime.

Juliette

MVH, α 8010
Transcription de Nicole Savy

a) « ennuyeuse ».

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