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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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22 mars 1843

22 mars [1843], mercredi matin, 11 h. ½

Bonjour mon petit Toto bien-aimé, bonjour mon cher amour adoré. Comment vont tes beaux yeux ce matin, mon Toto ? As-tu pris quelque repos cette nuit ? Tu m’as quittée de bien bonne heure hier au soir et moi j’aurais bien voulu rester avec toi toute la nuit. Est-ce que tu avais encore des épreuves à corriger, mon Toto, que tu t’en es allé si vite ? Je serai bien contente quand ta pièce aura paru parce que tu pourras te reposer et parce que j’espère que je pourrai profiter de ton loisir pour t’avoir plus souvent et pour t’aimer plus à mon aise. Cet espoir ne se réalisera peut-être pas plus que tous ceux que j’ai conçusa jusqu’à ce jour ; mais enfin, pendant que j’espère, je prends patience et courage et c’est comme cela que je viens à bout de passer les heures, les jours, les mois et les années à attendre un bonheur qui ne vient pas.
Tu es sans doute occupé aujourd’hui pour la représentation de demain, mon Toto ? Il est clair que si le théâtre avait un directeur intéressé, il serait très facile d’empêcher cette ignoble cabale. Mais dans la pétaudière du Théâtre-Français je crains que tu ne te donnes une peine inutile. Il faut cependant essayer pour n’avoir rien à se reprocher.
Si tu penses, mon Toto, que je ne peux pas aller à la représentation de demain, quel que soit mon désir d’y assister, je me résignerai à rester seule chez moi. Je me mets, comme toujours, à ta disposition. Je sens d’ailleurs que je serai très malheureuse si, comme ce n’est que trop probable, on troublait la représentation. Je m’abandonne tout à fait à ta volonté tout en désirant qu’elle me soit favorable et puis, j’y pense, je porterai peut-être bonheur à la pièce si j’y étais demain soir. J’en suis très capable. Certes, si l’amour le plus pur et le plus dévoué, et l’admiration la plus passionnée peut quelque chose sur la haine et le crétinisme de tes ennemis, je dois les foudroyer demain par ma seule présence. Ceci est une considération qui mérite attention. Et puis je désire être toujours le plus près de toi et tu seras demain soir au théâtre.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16351, f. 249-250
Transcription de Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette

a) « consçu »

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