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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 janvier [1839], mercredi matin, 9 h. ½

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour mon petit homme. Malgré votre promesse cette nuit vous n’êtes pas revenu, c’est bien mal à vous. Si j’avais su que vous aviez l’intention de me manquer de parole, toute malade que j’étais, je ne vous aurais pas laissé partir si tôt. Mais soyez tranquille, à présent je ne tiendrai plus aucun compte de vos promesses et quand je vous tiendrai, je ne vous laisserai plus partir qu’à bon escient.
Je me sens mieux ce matin. J’espère que je pourrai me lever sans inconvénient tout à l’heure. Toto, je vous aime, Toto, je vous désire. Je voudrais bien avoir déjà la copie du portrait qui n’est pas commencé. J’espère qu’elle sera plus ressemblante que le portrait de ce pauvre Nanteuil qui ne me satisfait pas du tout. Je suis presque toujours sans toi, ce qui fait que j’ai le plus grand besoin de choses qui se rapprochent le plus de mon idée fixe, de mon amour. Quand donc, mon petit homme, me ferez-vous dîner en ville avec vous ? Il y a bien longtemps que je vous le demande et que vous me promettez toujours sans tenir. Je voudrais cependant faire un petit dîner d’amoureux : en un an, une fois, ce n’est pourtant pas trop. Pensez-y, mon Toto. Tâchez de me donner ce pauvre petit plaisir-là, en attendant mieux.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 59-60
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette


16 janvier [1839], mercredi soir, 6 h.

Mon cher petit homme, c’est vraiment dérisoire le temps que vous donnez à mon bonheur. Je ne vous fais pas de reproche, mais en vérité est-ce que vous croyez que je dois me trouver bien heureuse ainsi ? Hélas, dans le même moment où je vous fais le reproche de n’être pas assez avec moi, je me souviens que je n’ai plus un sou chez moi grâce à la fabrique à qui j’ai donné 10 F. en acompte et à qui j’ai été forcée d’en promettre autant tous les mois grâce aux petites provisions d’épiceries que la mère Pierceau vient de m’envoyer et que je crois avoir payé deux fois au moins pour le sucre, ce qui s’éclaircira d’une façon ou d’une autre. Enfin grâce à tout cela, je n’ai plus d’argent et beaucoup trop d’amour car je te désire et j’ai besoin de toi plus que jamais. Mon bon petit homme chéri, j’entends la porte. Si ça pouvait être toi, QUEL BONHEUR. Il paraît, mon Toto, que vous en voulez comme un goulu de mes dessins mais, mon adoré, vous ne sentez pas que c’est ma vie qui s’en va pour chaque chef-d’œuvre que je vous fais. Vous devriez, si vous m’aimez, être plus avare de mes [JOURS  ?] et moi moins prodigue de mon TALENT. Toto est bien i. Soir pa. Venez cette nuit.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 61-62
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

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