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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 juillet [1838], mercredi matin, 10 h. ¾

Bonjour mon bon petit homme, bonjour mon chéri. Comment vont tes yeux, mon adoré ? Je voudrais savoir si le remède a agi et bien agi. Je voudrais savoir aussi comment va ma chère petite Dédé. C’est bien triste de vous savoir tous les deux souffrants sans pouvoir vous donner mes soins. Je suis bien mal partagée car de tout ce que je désire le plus au monde après être aiméea de toi, c’est de me dévouerb pour toi et les tiens. C’est bien vrai mon petit homme. Je ne connais pas de plus grand bonheur que de te servir à genoux. Vous m’avez privée d’un bien grand plaisir, celui de vous faire des petites surprises de temps en temps. Je ne me plains pas parce qu’auparavant mon plaisir, je cherche à ne pas vous déplaire mais vous avez tort d’ôter à l’amour toutes ses petites mômeries pour ne lui laisser que le culte froid et sérieux d’un amour de 70 ans. Je me soumets à cela comme à tout ce que vous voulez et d’ailleurs il n’y a que moi de punie. Tu verras qu’aujourd’hui, mon petit homme, j’ai bien besoin de reprendre des forces et du courage depuis hier. Je suis toute démoralisée.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16335, f. 69-70
Transcription de Sandra Glatigny assistée de Gérard Pouchain

a) « aimé »
b) « dévoué ».


18 juillet [1838], mercredi soir, 5 h. ¾

J’ai eu bien de la peine pour arriver jusqu’à cette heure-ci, mon bien-aimé, aussi pour me récompenser, tu devrais venir tout de suite m’apporter de tes chères nouvelles ainsi que celle de ma pauvre petite Dédé. Je suis inquiète d’elle et de tes yeux, ce qui me rend ton absence encore plus difficile. Les chaussettes ne sont pas venues. Je n’ai vu absolument personne aujourd’hui. Hier, à cette heure-ci, tu es arrivé mais aujourd’hui je n’aurai pas le même bonheur. Je suis triste comme un vieux bonnet de nuit. J’ai bien de la peine pour ne pas être horriblement déraisonnable. Enfin, pour ne pas t’ennuyera et te fatiguer autant que je le suis moi-même, je vais changer de conversation. Je te dirai, mon amour, que j’ai acheté une claie sur laquelle j’ai la sanguinaire intention de faire expirer toutes les punaises qui se hasarderont dans mon baillage et autre lieu de ma juridiction. Ne pouvant assouvir ma férocité sur toi, je m’en prendrai à ce genre d’animal. Tant pis pour les innocents ou les innocentes ! Tousb ceux que je trouverai y passeront. J’espère que je fais assez d’efforts pour être gaie et spirituelle. Il faut me tenir compte de [l’entente ?] et m’aimer de toutes vos [forces ?].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16335, f. 71-72
Transcription de Sandra Glatigny assistée de Gérard Pouchain

a) « ennuier ».
b) « tout ».

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