7 février 1877

Paris, 7 février [18]77, mercredi matin, 9 h.

Bonjour, mon grand petit homme, bonjour, je t’adore – et vous ? Si oui, vive l’amour et vive la joie ; si non, vive l’amour encore et toujours. J’ai hâte de savoir si ta nuit a été aussi foncièrement bonne que la mienne. J’espère que Mariette va m’apporter de bonnes nouvelles. Mais d’ici là je vais passer en revue tes lettres et tes journaux afin de te signaler ceux qui méritent ton attention. Il y a bien aussi les livres et les brochures, mais il n’y a aucun moyen pour moi de t’en dire quoi que ce soit, pas même les titres. Aussi je n’y essaie même pas. Je voudrais pour beaucoup que tu sois hors de ton coup de feu pour reprendre un peu de vie et d’âme avec toi en plein air et en pleine liberté. Jusque là il faut se résigner à étouffer entre quatre murs et à ne te voir qu’entre deux épreuves à corriger. Mais comme cette vie de forçat, pas libéré, ne peut pas toujours durer, je compte bien te redemander MES QUARANTE-HUIT SOUS D'ANCIEN sous forme de voitures à l’heure et même découvertes dès que le temps le permettra. Celui-ci, de temps, quoique doux est assez grognon, aussi je ne regrette pas de n’en pouvoir profiter. J’attendrai, je le répète, que tu sois sorti de tes épreuves pour faire valoir mes droits à la lumière, au soleil, à la vie et à l’amour, à la joie et au bonheur.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 39
Transcription de Guy Rosa