31 mars 1880

Paris, 31 mars 1880, mercredi matin, 7 h. ½

Quel bonheur, mon grand bien-aimé, tu as passé une bonne nuit, ce qui me fait espérer que tu voudras nous en faire profiter en te levant assez tôt pour pouvoir déjeuner avec nous. Mme Lockroy a fait demander le déjeuner à midi très précis, parce qu’elle a pris rendez-vous avec Nadar pour la photographie des deux enfants [1] dans leurs costumes espagnols. Puis je crois que nous devons tous nous faire vacciner chez Allix ce soir de cinq à six heures, sans préjudice de notre promenade, je l’espère ; journée bien remplie comme tu vois. Il fait un temps admirable, quoiqu’un peu frisquet, c’est le cas ou jamais d’en profiter, car la rentrée du Sénat approche et coupera forcément nos douces récréations quotidiennes. Donc, mon cher petit homme, je le répète, profitons de tout ce que le bon Dieu met à notre disposition en ce moment-ci : beau temps, beau loisir, bonne santé, bon amour, et le reste pendant l’éternité. Sur ce, je vais aller refermer ta fenêtre, et baiser ton front et tes mains, sans te réveiller. Je te souris et je t’adore.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16401, f. 90
Transcription de Blandine Bourdy et Claire Josselin