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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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26 juin 1849

26 juin [1849], mardi matin, 7 h.

Bonjour, mon Toto aimé, bonjour, mon tout adoré, bonjour. Dors, repose-toi et ne te lève qu’à la dernière extrémité. Tu as bien le temps de te fatiguer puisque lorsque tu y es, tu mets les morceaux doubles. Quant à moi, mon Toto, je suis si heureuse que je n’ai pas eu un instant de lassitude. Je serais toute prête à recommencer, même l’ascension de la côte de Bonsecours [1] avec la même pionnière en tête, tu vois combien le bonheur me rend brave pendant que j’y étais dans cette bienheureuse journée. J’ai rempli mes yeux, mon cœur, mon âme de toi. Et même, comme les portières qui vont dîner en ville, j’en ai mis pleina mes poches. Toute cette immense provision d’amour ne m’empêche pas de sentir déjà ce matin l’appétit de te voir, au contraire, c’est un stimulant qui creuse d’énormes trous dans mon cœur et qui ne seront comblés qu’avec beaucoup de culottes et beaucoup de bonheur. J’espère pour toi et pour moi que tu ne seras pas forcé de sortir dès le matin pour cette commission d’enquête et que nous pourrons aller ensemble à l’Assemblée. Je tiens à ne pas me démunir tout de suite de mon cher petit trésor de plaisir de joie et de courage. Je sais trop que l’occasion de se ravitailler de ce genre de denrées ne se présente pas tous les jours ni même tous les dimanches. Aussi je voudrais ne pas toucher au mien de longtemps. Pour cela, il faut que tu paies……. de ta personne.

Juliette

MVHP, MS 1632 a256
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine

a) « pleins ».


26 juin [1849], mardi matin, 11 h.

Je voudrais bien que tu n’aies pas été forcé de sortir sans moi, mon doux amour, d’abord parce que tu serais moins fatigué au bout de la journée, ensuite parce que j’aurais le bonheur de t’accompagner jusqu’à ta boutique, ce qui me ferait bien plaisir. Comment vas-tu, mon petit homme ? Tu avais hier quelque chose qui attristait ta noble et belle figure. Peut-être n’était-ce que de la fatigue, mais très certainement, tu n’étais pas gai et souriant comme d’habitude. Tu m’as gâtée par une mansuétude et une égalité d’humeur si aimable et si charmante que dès que je te vois un peu morose, je crains que tu ne souffres en toi-même par le corps ou par l’esprit, ce qui me serait également odieux. Après cela, la fatigue de la route, les préoccupations multiples, les devoirs de toutes sortes n’expliquent que trop pourquoi tu étais sérieux hier au soir. J’espère qu’une bonne nuit et la pensée du bonheur que tu m’as donné pendant ces deux jours auront fait disparaître toutes traces de fatigue et de tristesse. J’ai une manière de baiser mes T qui ne facilite pas excessivement la lecture de mes gribouillis. Il paraît que c’est dans mon organisation. Cependant, j’y ferai attention et je crois qu’avec beaucoup de patience et de difficultés je parviendrai à avoir une calligraphie très soignée. Voime, voime. Pauvre Juju pattes de mouches crois cela et tu n’iras pas plus droit.

MVHP, MS a8231
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine

Notes

[1Juliette et Hugo sont partis le dimanche précédent passer un jour et demi à Rouen. Ils ont grimpé la côte de Bonsecours, à l’est de Rouen.

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