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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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9 juillet [1844], mardi matin, 11 h. ¼

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour, mon cher petit homme ravissant, bonjour, bonjour, je t’aime de toutes mes forces et encore plus. Tu travailles, mon pauvre amour, je ne veux pas te déranger, aussi, mes baisers vont-ils sur la pointe du pied se poser sur ta ravissante petite bouche rose sans que tu t’en aperçoivesa. Je vais envoyer tout à l’heure chez Claire pour lui porter l’odeur qu’elle demande. Je regrette que tu n’aies pas pu la choisir toi-même car, comme c’est pour toi, il est bien juste que cela te plaise et ne te fasse pas mal à la tête. J’en ai fait demander plusieurs échantillons à Lambin, je verrai à prendre celle qui sera la moins forte et la plus agréable à mon goût. Je ne veux pas, mon petit bien-aimé, que tu me croies aucune prétention comme femme… Je n’en ai qu’une, et celle-là, j’y tiens plus qu’à ma vie, c’est de t’aimer comme jamais femme n’a aimé et ne pourra aimer un homme. J’ai besoin que tu m’aimes comme j’ai besoin de t’aimer et de respirer. Le jour où tu ne m’aimerasb plus, je mourrai, voilà tout. Tu sais bien que c’est vrai, n’est-ce pas mon adoré ? Tu sais bien que tu es ma vie et ma joie. Ton amour, c’est ma jeunesse et ma beauté, toutes les autres femmes sont laides et vieilles auprès de moi si tu m’aimes. Je ne regrette rien, je ne désire rien, je n’envie rien, je n’ai besoin de rien que ton amour. Ô, si tu savais comme c’est vrai ce que je te dis là, mon Victor ineffable et divin, tu ne pourrais pas ne pas m’aimer toujours.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 243-244
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « aperçoive ».
b) « aimera ».


9 juillet [1844], mardi soir, 9 h. ¼

Il était temps, j’espère, que nous arrivassions. Eh bien non ! Je voudrais être sous la pluie et ne t’avoir pas quitté. C’est un si grand bonheur pour moi d’être avec toi qu’il n’y a pour moi ni mauvais temps ni endroits maussades, tout est soleil et joie dès que je suis à ton bras. Merci, mon adoré, merci, mon cher bien-aimé, merci, tu es mon Victor béni. Tu as fait une bien bonne surprise à cette pauvre Claire, et, malgré le sermon maternel traditionnel et de rigueur, elle a été ravie de ma visite. Pauvre enfant, je voudrais qu’elle se fît aimer dans cette maison, ce serait une grande tranquillité pour moi et une place toute trouvée pour elle. Aussi, j’y fais tous mes efforts et je te prie de me seconder quand l’occasion s’en présentera.
Jour Toto, jour mon cher petit o, je baise tes quatre petites pattes blanches. Vous avez des framboises qui sentent joliment BONNES, vous devez les sentir d’où vous êtes. Si vous avez bon nez, vous viendriez les manger tout de suite. Moi, je mangerais vos joues et je serais très contente. Si tu viens tard, je serai à moitié endormie et je te verrai à peine. Ça ne sera pas aussi gentil que si tu venais tout de suite. Je m’aperçois que toute ma lettre ressemble pour le style et pour les idées à la fameuse romance de M. de la Palisse : je t’en demande pardon, mon Toto, ça n’est pas de ma faute ; plus je vais en avant et plus je suis stupide, je ne sais pas à qui cela tient. Après cela, ça ne m’empêche pas de t’aimer, au contraire. Aussi, je ne m’en inquiète que parce que ça doit t’ennuyera d’une manière atroce. Mais tu n’es pas forcé de lire ces informes gribouillis, mon adoré, je t’en dispense et redispense pense à la condition que tu m’aimeras toujours.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 245-246
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

b) « t’ennuier ».

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