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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 janvier [1844], mardi matin, 10 h. ¾

Bonjour, mon petit Toto bien aimé. Bonjour taquin, bonjour méchant, bonjour scélérat d’homme. Comment allez-vous ce matin ? J’espère que je vous ai proposé de fameuses énigmes hier. Il a fallu toutes ma bonté pour vous aider et pour vous tirer d’embarras en vous soufflant mot à mot ce que vous auriez dû savoir. Une autre foisa je ne serai pas aussi complaisante, je vous en préviens et je vous laisserai au milieu de vos deux gribouillis quotidiens le nez par terre. À propos de nez je crois que vous m’avez emporté mon mouchoir cette nuit. S’il n’est pas dans mon armoire, vous l’avez. Tâchez de me le rapporter. Il est brodé et marqué à mon nom et votre blanchisseuse ne vous le rendraitb pas. C’est aujourd’hui que je vais savoir si la fameuse caisse est flambée. Rien ne peut me contrarier davantage, en dehors de nous, que cet incident peu romanesque. C’eût été moi probablement la mystification aurait eu lieu la même chose. Mais, malgré que j’en aie, je ne peux pas croire qu’il n’y ait pas un peu de la faute de ces infortunés blaireux de Lanvin. Enfin, il faudra pourtant que je me résigne à cette nouvelle infortune mais je dois avouer que ce ne sera pas sans peine.
Tu auras sans doute une dernière entrevue avec ce pauvre M. Nodier ? Ce sera pénible pour toi, mon pauvre bien-aimé, car tu l’aimais depuis longtemps. Je te plains. Pense à moi mon Toto adoré, pense que tu es ma vie, mon espoir, ma religion et mon Dieu. Je n’aime, je n’espère et je ne crois que toi et qu’en toi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16354, f. 85-86
Transcription de Chadia Messaoudi assistée de Chantal Brière et Florence Naugrette

a) « autrefois ».
b) « rendrais ».


23 janvier [1844], mardi soir, 11 h.

Mon cher petit bien-aimé, je t’attends, je te désire et je t’aime. Je trouve le temps bien long même quand je ne suis pas seule. Je sais que tu es allé ce soir chez ce pauvre docteur Parent. J’ai vu la mère de Mme Guérard qui me l’a dit. Elle venait savoir de mes nouvelles mais ça m’est égal tout cela. C’est toi que je veux, je me fiche de tout et de tout le monde. Ce qui m’intéresse, ce que je désire, ce que je veux, c’est toi mon Toto. La mère Lanvin m’a demandé de voir Marie Tudor, je le lui ai promis en ton nom. Tu ne peux guère refuser ces pauvres gens que nous dérangeons à chaque instant. Je suis même sûre que pour ravoir la susdite caisse [1], ou l’équivalent, il y aura beaucoup de tirage. Et puis d’ailleurs la peine que se donne le cousin Félix pour mes cadres mérite bien quelques encouragements. Ainsi, c’est dit. Tu me donneras un petit mot pour Lireux que je leur donnerai et qui les comblera de joie. Il faudra, mon pauvre adoré, que tu me mènes voir Mme Pierceau le plus tôt que tu pourras. Ne fût-cea même pas un acte de charité chrétienne qu’il faudrait de toute nécessité me faire sortir car il y a plus d’un mois que cela ne m’est arrivé et que je crève dans ma peau faute d’air et d’exercice.
Baisez-moi dans toute son acception. Je vous l’ordonne.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16354, f. 87-88
Transcription de Chadia Messaoudi assistée de Chantal Brière et Florence Naugrette

a) « fusse-ce ».

Notes

[1Juliette a envoyé une caisse à sa sœur et son beau-frère qu’ils n’ont pas encore reçue.

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