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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 septembre [1842], mardi matin, 8 h. ½

Vous êtes parti [1], mon cher bien-aimé, pour cette fois, ce n’est que trop sûr. Je vous ai attendu jusqu’à plus de huit heures hier en tiers avec ma servarde et ce monstre de gigot que vous avez eu d’indignité de me laisser acheter et qui va être perdu si vous ne venez pas ce soir le manger. Ce sera d’autant plus spirituel qu’il y en a eu pour quatre francs  ! Enfin, mon pauvre adoré, c’est vous qui l’avez voulu. Vous êtes le maître de toute chose et tout ce que vous faîtes est bien …….a quand ça n’est pas mal. Voici du reste l’emploi de ma journée d’hier : FAIT MON MÉNAGE, DONNÉ AUDIENCE À MME LEDON, donné de L’ARGENT à Lafabrègue, reçu ma blanchisseuse, écrit à mon Toto, désiré mon Toto, attendu mon Toto, donné au diable mon Toto, avoir bisqué contre mon Toto, avoir ragé pour mon Toto, avoir été bien triste et bien malheureuse de l’absence de mon Toto, avoir aimé et adoré mon Toto. Voilà l’emploi de ma journée, je dirais presque de ma nuit si ce n’est la petite intercalationb que voici : avoir lavé ma tête depuis 11 h. jusqu’à minuit avec deux jaunes d’œuf, avoir dormi depuis minuit jusqu’à sept heures en rêvant à mon Toto. Voilà, à un clignement d’œil près, à une démangeaison de nez ou de l’oreille, les seules actions que je me sois permises, mon amour, tout en pensant à vous et en vous aimant. Depuis une heure, j’ai déjà presque fait ou fait faire MON MÉNAGE. Je vais me passer la tête au son pour compléter le lavage d’hier au soir et tantôt, si le Ledon ne me fait pas faux bondc, je me ferai cette aimable opération que vous savez : il y a près de six semaines que cela ne m’est arrivé. À propos d’arrivé, tâchez que votre arrivage ne se fasse pas plus longtemps désirerd et attendre, si vous ne voulez pas que je grogne énormément et que je sois la plus triste et la plus malheureuse des femmes. J’embrasse vos chers petits pieds pour les faire venir plus vite.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16350, f. 127-128
Transcription de Laurie Mézeret assistée de Florence Naugrette

a) Les sept points de suspensions courent jusqu’au bout de la ligne.
b) « intercallation ».
c) « bon ».
d) « désiré ».

Notes

[1Les enfants de Victor Hugo, ainsi que sa femme, sont partis entre le 24 et le 25 août s’installer pour quelques mois à Saint-Prix dans le Val d’Oise. Victor Hugo va donc régulièrement les y rejoindre, comme la veille où il a passé la journée parmi les siens.

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