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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1835 > BnF, Mss, NAF 16323, f. 231-232

Jeudi matin, 10 h. ¾

Bonjour, mon bien-aimé, vous n’êtes pas venu encore ce matin, et moi je vous attendais. J’ai passé une bonne nuit, je ne me suis pas relevée du tout. Il m’a semblé que tu n’es pas sorti tout de suite hier de la maison, et un quart d’heure après toi, on a frappé un gros coup. J’ai cru que c’était toi qui rentrait, mais je me suis trompée évidemment. Je vais toujours faire monter la portière comme nous en sommes convenus hier au soir. Je saurai ce qui a été dit à la lettre. Je voudrais comme toi que l’affaire se renouât. Il y aurait pour nous économie d’ennuis, de peines et d’argent, ce qui est bien quelque chose pour deux pauvres petits amoureux comme nous sommes. Ce que tu m’as dit hier sur la nécessité de travailler, de ne pas me voir, me fait trembler pour aujourd’hui. Je crains que tu ne mettes cette dure nécessité en œuvre aujourd’hui même, sans me demander si je suis prête. Il est vrai que ma réponse ne différerait pas plus un jour que l’autre, et serait cellea que tous les amoureux connaissent. Je ne suis pas prête du tout. Si mon pressentiment ne me trompait pas, si en effet tu travailles et que tu ne puisses pas venir, je ferai tout mon possible pour ne pas souffrir, je tâcherai de vivre dans le coin le plus heureux de mon cœur, mais il faut pour cela que tu ne me trompes pas, toi. Il ne faut pas pendant ce temps-là que ton temps, celui que tu me dois lorsque tu ne travailles pas, se passeb en promenades criminelles, en conversations plus ou moins coupables, car alors, j’ai le droit de me faire tout le mal que je voudrai et Dieu sait que je m’en ferai le plus que je pourrai. Vous entendez ? Voici le soleil qui se fait caissier d’Angelo pour ce soir, la recette sera un peu plus brillante que ses rayons.
Moi, je voudrais te voir. J’ai soif et faim de ton corps et de ton âme. Si tu savais comme je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16323, f. 231-232
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « celles ».
b) « ce passe ».

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