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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 mars 1853

Jersey, 23 mars 1853, mercredi matin, 8 h.

Bonjour, mon ravissant petit bien-aimé, bonjour. Tout ce que tu fais est juste, tout ce que tu dis est doux, tout ce que tu pensesa est bon, tout ce que tu médites est sublime. Je t’aime, je te crois, je t’admireb et je t’adore. J’ai peur quelquefois de te fatiguer de mes confidences multipliées et le plus souvent puériles mais tu as une patience et une bonté à toute épreuve et qui ne se lassentc jamais. Ce qui m’inspire la confiance de tout te dire, même les choses les plus folles et les plus insignifiantes. Du reste, mon adoré bien-aimé, il est bien naturel, puisque toutes mes actions et toutes mes pensées se rapportent à toi, [que] tu sois informé de tout. Merci, mon cher adoré, merci des marques d’estime et de tendresse que tu me donnes et qui me sont d’autant plus précieuses et plus douces que je les mérite peut-être encore plus que tu ne crois. Quant aux préjugésd qui me frappent en dehors de toi, je n’ai jamais essayé de les combattre avec d’autres armes que la résignation, non par fausse humilité mais au contraire par un légitime sentiment de fierté de ce que je vaux par le cœur et par l’honnêteté dans sa vraie acception. Aussi, mon adoré, loin d’en vouloir à ceux qui me jugent avec préventions, je leur pardonne sans le moindre effort. Pourvu que je me sente aimée de toi, tout le reste m’est égal. Mon honneur c’est de t’aimer. Mon bonheur c’est que tu m’aimes.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16373, f. 293-294
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette et Gérard Pouchain

< /br>a) « pense ».
< /br>b) « admires ».
< /br> c) « lasse ».
< /br> d) « préjugées ».


Jersey, 23 mars 1853, mercredi après-midi,1 h.

Et moi aussi je GIBOULE en vous attendant, mon cher petit homme, et je fais grêler sur vous mes élucubrations traversées de rayons d’amour à l’INSTAR du Père Éternel. Vous voyez que je prends exemple d’un peu haut. Quant à vous, mon cher petit homme, il me paraît difficile que vous vous livriez à la POSE [1] aujourd’hui, à moins que vous ne teniez à multiplier le GROËNLANDAIS [2] sous toutes ses formes, y compris celle d’ours blanc. Vous en êtes le maître, mais vous êtes le maître aussi de venir me voir et de me rendre très heureuse. Quant à moi je n’y peux rien, ce dont j’enrage, que vous attendre et vous aimer avec la persévérance de l’écureuil dans son trente-mil (l’orthographe n’est pas de rigueur), ce que je fais sans me décourager et puis je vais finir de CORRIGER VOS DISCOURS [3], à défaut de vous-même qu’il me serait encore plus doux de CORRIGER en chair et en os. Voime, voime, polisson, si vous l’étiez autant de fois que vous regardez les cocottes jersiaises et les toupies cosmopolites avec d’affreuses pensées, je crois qu’il vous en cuirait fort et que vous finiriez par demander grâce. Taisez-vous monstre d’homme, JE SAIS TOUT et bien autre chose dont vous ne vous doutez pas. Venez vite si vous tenez à ne pas aggravera tous vos crimes par une absence trop prolongée.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16373, f. 295-296
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette et Gérard Pouchain

a) « agraver ».

Notes

[1Référence possible à une séance de prises de vue photographiques.

[2À élucider.

[3Manuscrit des Œuvres oratoires, recueil de pièces composées avant l’exil et édité par le bruxellois Jean-Baptiste Tarride. (Cf. lettre du 2 mars 1853, mercredi matin 8 h – note 1.)

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