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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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22 juin 1872

Paris, 22 juin [18]72, samedi soir, 4 h. ½

Je suis bien contente, mon grand petit homme, de savoir que tu as passé une bonne nuit et que cette chaleur fiévreuse, loin de te nuire, t’est agréable. Quant à moi je ne peux pas en dire autant car elle me paralyse et elle m’énerve au-delà de toute expression. Je n’ai de courage à rien si ce n’est à t’aimer. Tout le reste m’accable et m’est insupportable, et je voudrais pouvoir vivre dans une cave bien noire et bien fraîche et n’avoir pas d’autre occupation que de t’aimer. En attendant que ce programme se réalise, je fais de nécessité vertu en mettant pour ton compte les petits plats dans les grands. Tu as vu par la lettre du fils de M. La [suite illisible] que son père est allé enterrer sa belle-mère, ce qui l’empêchera de dîner ce soir ici. Cette excuse peut se passer de commentaire. Espérons que tes autres convives auront des raisons plus riantes pour être exacts ce soir. Mme Lanvin m’a apporté la note acquittée de Saint-Mandé, en voici le détail : 9 mois – 18 F., entourage repeint en blanc 5 F., en tout 23 F. plus trois francs de fleurs achetées par moi hier. Hélas, quoi qu’on fasse pour cacher le trou noir et pour le parer, rien n’y fait et le mirage de l’absence éternelle n’en ressort que plus vivement dans la pensée et dans le cœur. C’est pourquoi je demande tous les jours à Dieu de ne pas te survivre, ne fût-ce qu’un minute. Que ta vie comme ta mort soient ma vie et ma mort.

BnF, Mss, NAF 16393, f. 178
Transcription de Guy Rosa

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