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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 décembre [1836], vendredi midi

Malade et sans feu hier au soir, je n’ai pas pu t’écrire. D’ailleurs ce que je t’aurais écrit n’aurait été que des plaintes et des reproches sur ton peu d’égard envers moi. J’ai donc mieux aimé me taire. Je t’ai attendu sans dormir jusqu’à près de trois heures du matin. Aussi lorsque tu es venu à 4 h. étais-je plongée dans le sommeil le plus profond. Je ne dis pas cela pour excuser l’accueil que je t’ai fait car il est certain qu’eussé-je été des plus éveillée, je t’aurais exprimé le chagrin de n’être pas mieux traitée par toi. Je sais bien que tu m’objecteras ton travail, mais je trouve fort triste que pour me donner du pain tu me prives de tout bonheur et de toute joie au monde. Je ne parle pas de ma santé qui s’altère de jour en jour à ce régime inverse de tout le monde. Il me semble qu’au lieu de venir à 4 h. du matin tu aurais pu venir après ta soirée, en supposant qu’il ne t’aita pas été possible de t’échapper cinq minutes dans toute une heure comme autrefois. Mais non, tu ne peux plus parce que tu ne veux plus, parce que tu ne sens plus le besoin de me consoler, de me rassurer sur des faits toujours alarmants quand on aime comme je t’aime. Aussi c’est ce qui fait ma tristesse, mon humeur comme il te plaît d’appeler mon amour malheureux. Aussi, va, je fais bien tous mes efforts [pour essayer  ?] de te délivrer de moi le plus tôt possible.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16328, f. 245-246
Transcription de Claudia Cardona assistée de Florence Naugrette

a) « qu’il ne t’ai ».


16 décembre [1836], vendredi soir, 8 h.

Et moi aussi je déborde. Il y a si longtemps qu’il pleut de l’amour dans mon cœur que ma vie entière est submergée, mes caves sont remplies jusqu’aux soupiraux, mes catacombes sonta minées et infiltrées, et si vous n’y prenez pas garde, je vous imbiberai de la tête aux pieds du même sentiment.
JOUR, MON Toto bien aimé, je vous demande bien pardon si vous plaît [1], de tout mon cœur, je ne le ferai plus jamais excepté les jours où vous vous conduirez vraiment mal avec moi.
Mon petit Toto adoré, je préfère à tout, toi. Je ne vis que dans toi et que par toi, quand vous êtes trop longtemps sans vous montrer à mon horizon, mon soleil, eh bien je languis, je souffre et je vous fais les mêmes reproches que les fleurs et les arbres qui ont besoin de leur soleil pour vivre et pour fleurir font au leur quand il s’absente trop longtemps. Ne vous moquez pas de mes comparaisons. Pensez plutôtb à me rendre la vie moins triste et moins sombre en me donnant tout votre amour pour l’égayer et l’illuminer. De mon côté je vous promets de me laisser faire et d’être la petite personne la plus joyeuse et la plus heureuse qu’il y ait sous le ciel.

BnF, Mss, NAF 16328, f. 247-248
Transcription de Claudia Cardona assistée de Florence Naugrette

a) « son ».
b) « plus tôt ».

Notes

[1La faute est volontaire.

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