Guernesey, 27 novembre [18]68, vendredi matin, 8 h
Bonjour, mon tout bien-aimé, j’ai passé une bonne nuit et je me hâte de te l’offrir à charge de revanche de ta part. Je te donnea mon cœur et mon âme à la même condition. Je te les donne même sans condition car je ne sais pas ce que j’en ferais si tu n’en voulais pas. J’attends la lettre du citoyen Lacroix avec impatience pour savoir jusqu’où peut aller son ébahissement et son enthousiasme belges [1]. Il est probable que tu en auras des nouvelles demain, ne fût-ceb qu’un simple accusé de réception. Je suis aussi très empressée de voir ton beau dessin gravé dans le livre de Burty [2]. Heureux ceux qui en auront un exemplaire et tu es sûr d’être du nombre. Quant à la vile multitudec dont je suis, on leur en souhaite… et puis v’la tout ! Voir c’est avoir, dit le proverbe, à cette condition-là, je ne peux pas manquer que d’en être propriétaire au moins pendant un clin d’œil. C’est déjà beaucoup et je tâcherai que cela me suffise pourvu que vous me restiez comme appoint.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 326
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « je te te donne ».
b) « ne fusse ».
c) « la ville multitude ».