Guernesey, 21 juillet [18]68, mardi matin, 6 h. ½
Je te souhaite ta fête [1], mon cher adoré, à travers l’âme de ton cher petit Georges [2]. C’est sur ses petites ailes blanches que je dépose tous les baisers que je t’envoie. J’épiais depuis une heure avec anxiété le moment de ton réveil et je ne suis pas encore tranquillisée connaissant tes habitudes extramatinales. J’espère pourtant que tu as passé une aussi bonne nuit que moi et je serai bien heureuse si je ne me trompe pas. Tu sais, mon pauvre adoré, que parmi les nombreux embêtements de notre départ, il y a celui du dépôt de la caisse d’argenterie à la banque ? Je t’en fais souvenir. Je te fais souvenir aussi que Suzanne est au bout de son rouleau… d’argent et qu’il serait utile de la ravitailler le plus vite possible. Je ne te parle pas des autres choses ennuyeuses qui nous restent à faire. Tu les connais de reste. Mais si nous devons partir lundi, il est plus que temps de s’en occuper, le dimanche ne comptant pas dans ce pays cagot, bigot et ragot, comme dit Talbot pour la rime.
Tu es mon grand bien-aimé que j’adore.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 202
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette