Guernesey, 11 avril [18]68, samedi, 6 h. ½ du matin
C’est encore aujourd’hui fête, mon cher bien-aimé ; d’abord parce que je t’adore, ensuite parce que c’est le ONZE AVRIL et enfin parce que Suzanne a décrété qu’il en devrait être ainsi chaque fois que j’ajouterais une année de plus à mes vieilles années déjà si nombreuses. Cela étant, il y aura une solennitéa ce soir en l’honneur de mes SOIXANTE-DEUX ANS accomplis, ce qui ne veut pas dire parfaits. Loin de m’opposer à cette innocente tradition, je m’y prête, au contraire, parce que ce sera pour cette pauvre fille l’occasion de nous faire un bon dîner P. P. I. [1] Demain ce sera au tour de Marie à nous montrer les vertus culinaires et la couleur bleue de ? son cordon.
J’espère que tu as bien dormi, mon cher grand adoré ? Moi, un peu mieux que ces dernières nuits mais pas encore tout à fait bien. Je vais prendre un bain tout à l’heure qui me réussira je l’espère. Mais dans tous les cas, cela n’a pas d’importance et je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 103
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « une solenité ».