Guernesey, 4 février [18]68, mardi matin, 8 h.
Dors, mon pauvre bien-aimé, je t’aime.
Je vois avec tristesse que tu as passé une mauvaise nuit mais j’espère que tu la rendras meilleure en dormant beaucoup ce matin. Je viens de regarder au grand jour, pendant que je t’attendais, les deux nouveaux dessins que m’a donnés M. Chifflarta et je les trouve encore plus beaux qu’hier soir [1]. Je suis ravie d’avoir, grâce à lui, le portrait de ta chère petite grande maison. Je te prierai de trouver un moyen que je l’aie toujours sous les yeux en le plaçant dans un petit cadre que j’aurais dans ma chambre. Je viens de lire, toujours en attendant l’heure de ton lever, la belle lettre de Port-au-Prince [2] qui m’a été au cœur tant elle est émue, noble et religieusement admirative devant l’œuvre sublime que tu consacres à l’humanité. Cet hommage de reconnaissance envers ton génie VENU de si loin est une preuve nouvelle de la puissance de ta pensée et de la grandeur de ta gloire. Pardonne-moi de te dire si mal ce que je sens si bien. Je t’aime.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 34
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « Chifflard ».