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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 avril [1839], jeudi matin

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour mon adoré, vous devez au vacarme de votre cocotte et des maçons ce bonjour matinal, cependant j’ai si mal à la tête et à la gorge qu’il est probable que je resterai dans mon lit une bonne partie de la journée. J’ai un rhume de cerveau sur le chantier qui ne veut pas se décider pour ou contre moi, cependant voilà que j’éternue comme une grande fille. J’en ai le nez tout rouge. Je vais donner plusieurs leçons de civilisation à votre cocotte. Aujourd’hui il faudra bien à la longue qu’elle devienne une perruche ÉDUQUÉE. Quel temps fait-il ce matin ? Il me semble qu’on n’y voit pas. Au reste, il y a encore un mort dans la maison en face au même endroit. En voilà deux dans la même semaine et tous les jours, il n’y a pas de maison de la rue Saint-Anastase qui ne soit visitée par cette hôtesse. Notre maison est seule en retard mais je ne désespère pas de la voir cogner à ma porte un de ces jours. Tu seras bien débarrassé alors, mon pauvre petit homme et moi je continuerai à t’aimer s’il y a quelque chose de moi qui survit. Bonjour Toto. Aime-moi, crois-moi honnête et viens le plus tôta possible car je te désire de toutes mes forces.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 65-66
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « plutôt ».


18 avril [1839], jeudi soir, 6 h. ¾

Mon cher petit homme bien-aimé, n’importe où tu es, reçois ma pensée toute gonflée d’amour et de baisers. Jamais tu ne sauras à quel point tu es aimé car il faudrait épuiser tous les dévouements, tous les bonheurs, la terre et le ciel et encore tu n’en verrais pas la moitié. Ne sois pas inquiet, mon bien-aimé, ne te tourmente pas. Je suis fidèle, mon amour et tu es adorable, deux raisons pour être sûr de ta pauvre vieille Juju. J’ai chez moi les deux petites Bensancenot qui chantent comme des rossignols mais je doute que la cocotte se mêle au concert. Pauvre petite bête, je ne crois pas que je puisse jamais la civiliser, déjà cela me fait mal de la tourmenter. Au reste, ce n’est pas la première bête féroce avec laquelle je vivrai, vous en savez quelque chose, sauvage. J’aurais bien voulu pouvoir aller à Ruy Blas ce soir, malheureusement il est plus que probable que vos petits goistapioux se seront emparésa de la place, je leur souhaite bien du plaisir et à moi bien de la résignation. Ne venez pas trop tard et aimez-moi, mon petit homme, moi qui vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 67-68
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « emparé ».

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