Paris, 26 juin 1881, dimanche, 10 h.
Cher bien-aimé, je vais aller te porter mon gribouillis et savoir comment tu as passé la nuit. Entre-temps je débrouille avec Lesclide le stock des lettres, brochures, manuscrits et livres accumulés depuis plus d’un mois ; c’est effrayant ! Je doute qu’à vous deux vous puissiez venir à bout d’en prendre utilement connaissance d’ici à ce soir. Quant à moi, de les voir seulement, j’en ai un mal de tête épais et abrutissant qui me fait prendre en horreur toute cette paperasserie désordonnée capable d’engendrer sinon la folie, l’idiotismea [illis.] la plus complèteb .
Je t’en donne un échantillon en ce moment même où je ne sais plus auquel entendre ni ce que je fais ni ce que je dis. Je t’aime, voilà mon point de repèrec, mon étoile polaire, mon tout enfin ! Sans mon amour je ne sais pas si je pourrais distinguer la nuit du jour, le mal du bien, la mort de la vie. Je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime éperdumentd.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 140
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « idiostime ».
b) « complette ».
c) « repaire ».
d) « éperduement ».