11 février [1836], jeudi matin, 9 h. ¼
Bonjour mon cher petit frère adoré, je t’aime mon Toto chéri et il ne tient qu’à toi de commettre un inceste. En attendant, je voudrais savoir comment tu as passé la nuit, comment va ta chère petite gorge. Moi, j’ai assez bien dormi. Je me suis réveillé à 8 h. ¾. J’ai arrangé mon feu qui avait brûlé toute la nuit comme tu l’avais bien prévu, et puis je t’écris, et puis je pense à toi avec tendresse, et puis je te désire de toutes mes forces. Dans trois heures environ, vous ne serez pas ACADÉMICIEN, mon cher petit Toto et vous pourrez vous en VANTER. Moi, qui ne tiens pas aux avantages politiques lorsqu’ils sont habillés d’un habit académique, je fais les mêmes vœux que mademoiselle Didine et je me réjouis à l’avance de vous conserver sans aucun persil. Je n’y mets pas d’autre sel qu’un grain de bon sens et d’amour.
J’espère mon cher petit Toto que vous viendrez vous réjouir avec moi du succès du CAPITAINE DUPATY [1]. Je vous attends. Je vous aime de tout mon cœur et je serais bien contente si vous veniez très tôt.
En attendant, je vous baise bien fort et bien long, pour que mon baiser aille jusqu’à vous.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16326, f. 91-92
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa