Guernesey, 28 juin 1862, samedi, 7 h. ½ du m[atin]
Bonjour, mon bien-aimé, bonjour mon cher petit matinal, bonjour, amour et bonheur, bonjour.
J’espère que ton réveil matin ne veut pas dire insomnie de la nuit mais bon sommeil et bonne santé. Quant à moi, j’ai très bien dormi et je me porte comme un diable. Il y a longtemps même que je ne me suis sentie aussi bien. Sans compter que j’ai mon cher petit festival de ce soir en perspective, ce qui ne contribue pas pour peu à mon état d’enchantement et de santé. Je désire que rien ne vienne en diminuer la douceur et le charme, c’est pourquoi je te prie de ne pas m’amener ton nouvel hôte [1] dont la froideur et le gris se reflèteraient probablement dans nos bonnes joies et nos gros rires. Cependant, si tu ne peux pas faire autrement, je tâcherai de lui être le plus hospitalière possible en lui laissant tout son sérieux et toute sa gravité compassée. Pourvu que je te voie sourire et que je te sente heureux, je me fiche de tout, telle est ma force.
BNF, Mss, NAF 16383, f. 165
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa