Guernesey, 24 mars 1862, lundi matin, 7 h. ¼
Bonjour, mon doux adoré, bonjour, avant toute chose ; bonjour, je t’aime. J’espère que tu as passé une bonne nuit et que tu dors encore. Quant à moi, le soleil m’a réveillée il y a déjà longtemps. Aussi je vais en profiter pour faire faire mon ménage à fond. Cela ne m’empêchera pas de sortir avec toi tantôt si tu en as le temps. Je sens moi-même que j’ai besoin de marcher autrement que de grimper d’un étage à l’autre. J’ai assez peu dormi cette nuit sans souffrir donc je ne me plains pas, au contraire. Pour peu que tu te portes bien, je suis à mon aise dans la vie et je ne demande rien de plus au bon dieu. Pauvre adoré, quand je pense à mes inquiétudes sur toi il y a un an juste, je me trouve bien heureuse aujourd’hui dans ma sécurité.
Il y aura demain un an que nous nous embarquions sur l’ordre du médecin pour aller chercher la santé pour toi au hasard des auberges et de tous les incidents du voyage [1]. Grâce à Dieu, cela t’a parfaitement réussi et je ne demande plus que la continuation de ce parfait état de santé qui est ma joie et mon bonheur. Je t’aime.
BnF, Mss, NAF 16383, f. 74
Transcription de Marie Legret assistée de Florence Naugrette