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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 novembre [1838], dimanche après-midi, 1 h. ¼

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour, comment vas-tu ? Vous étiez bien drôle cette nuit dans le récit de votre bataille, et j’en fais bien mes compliments à Théophile Gautiera, qui vous a donné l’occasion de montrer votre talent romantique, et qui m’a fait passer un moment des plus agréables.
Malheureusement ce n’était qu’un moment, et depuis me voici [attachée ?] de nouveau à mes 24 heures de souffrance et d’ennui. Ce n’est ni un reproche, ni de la mauvaise humeur qui soit dans ces mots-là, mais de la tristesse et de l’impatience de vous voir, mon adoré bien-aimé. Si je ne vous aimais pas, cela me serait bien égal. Tâche mon pauvre ange, d’avoir de meilleures nouvelles à m’apporter ce soir, c’est vraiment inquiétant pour le sort de cette pauvre admirable pièce, que la bêtise et l’ineptie des directeurs, et la médiocrité des acteurs, y compris le mauvais vouloir et la grossièreté de l’artiste romantique professeur de déclamation [1].
Il fait un temps à porter le diable en terre, j’ai mal à la tête. Si tu pouvais me conduire ce soir chez la mère Pierceau, peut-être que cela me ferait du bien. Elle ne doit pas venir aujourd’hui ! Je n’ai toujours pas de nouvelles de Mme Kraft, les appointements deviennent de plus en plus vaporeux, et brouillards d’automne.
Papa est bien i. Je l’adore de toute mon âme, je le désire de tout mon cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 118-119
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

a) Gauthier.


4 novembre [1838], dimanche soir, 6 h. ½

Voici, mon cher petit homme, une grande lettre pour vous récompenser du soin que vous mettez à garder les petites. Je ne doute pas que cet encouragement ne porte ses fruits, et que vous ne perdiez d’ici à très peu de temps jusqu’à mon souvenir. Je vous ai vu une seconde, mon adoré, et ce petit tantinet de bonheur suffit pour changer la disposition de cœur triste et amer dans laquellea j’étais en commençant cette lettre. Maintenant, mon cher bijou adoré, je suis très GEAIE, ou du moins très résignée. Je vous permets même de perdre cette lettre en sortant de chez moi, à la condition que vous aurez la précaution de la déchirer en petits morceaux auparavant, parce qu’il est de toute inutilité de mettre la rue Saint-Anastase dans la confidence de mon amour et de votre insouciance. Vous êtes un charmant petit homme que j’aime de toute mon âme, mais vous n’y répondez pas assez. Enfin, parlons d’autre chose… Et n’abusons pas des points suspensifs… qui annoncent toujours une profonde ignorance de la langue française et du style, et qui ne sont tolérables que bien appliqués sur l’œil d’un fier à bras comme Théophile Gautier. Je vais écrire à Mme Kraft de ce pas. Je tiens beaucoup à savoir ce qu’il y a dans la caisse d’Anténor Joly, j’ai bien peur qu’il n’y ait pas UN SOU comme le dit Monsieur David du théâtre Français.
Voici Mme Pierceau que je n’attendais pas, qui m’apporte une lettre de Mme Kraft qui n’a rien TOUCHÉ et qui y va tous les jours, VENDREDI excepté. Elle envoie une robe à Claire en faux mérinos, dont je lui ferai un manteau si vous le permettez.
Je vous aime mon Toto, vous êtes bien i et bien charmant. Je vous adore et je suis folle de vous. Venez très tôt, je ne dîneraib pas pour souper avec vous.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 120-121
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

a) « lequel ».
b) « dinerez ».

Notes

[1Est-ce après un acteur de Ruy Blas que Juliette Drouet en a ?

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