Paris, 13 février [18]72, mardi gras, 5 h. ½ du soir
Je n’ai pas le courage, mon pauvre bien-aimé, de sourire à ce jour [1] qui se présente pour la trente-neuvième fois dans nos anniversaires fêtés et bénis, en pensant à tous tes deuils depuis l’année dernière [2], mais j’éprouve plus que jamais le besoin de te dire que tu es mon amour vénéré et adoré, que je veux vivre et mourir auprès de toi dans ce monde et ressusciter avec toi pour l’éternité. J’ai vu ce pauvre Mie tantôt, qui me paraît bien affecté de la mort de sa femme. Il viendra dîner ce jeudi pour se rencontrer avec Dulac et avec Pelleport. Nous ne serons que le nombre réglementaire, onze, même avec les trois Duverdier parce que Mme Charles et ton fils dîneront en ville ce jour-là. Ce soir Glatigny doit venir avec sa femme. J’aurais autant aimé un autre jour, tant je me sens fatiguée ; mais puisqu’il a choisi ce soir, va pour ce soir. J’ai encore à transcrire avant dîner la liste des demandes pour Ruy Blas [3]. J’ai à peine le temps de te donner mon cœur.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 40
Transcription de Guy Rosa
[Pouchain]