Guernesey, 19 juin 1857, vendredi soir, 5 h. ½
C’est bien vrai que tu es bon, mon cher adoré ; c’est bien vrai que tu as toutes les grâces comme tu as toutes les supériorités, c’est bien vrai que rien ne t’est comparable en vraiea générosité, c’est bien vrai que je te vénère, que je t’admire et que je t’adore. J’espère que tu ne te méprends jamais sur le fond de mes réclamations au partage des bric-à-bracb, et que tu ne crois pas ma rapacité plus sérieuse qu’elle ne l’est véritablement ? Sans cela, mon pauvre adoré, qu’est-ce que tu penserais de moi et comment pourrais-tu m’aimer si tu pouvais supposer un seul moment que toutes mes criailleries d’antiquaire goulue sont des prétextes à accaparement hideux. Ni toi, ni moi nous ne sommes dupes de nos chipoteries et de nos reproches mutuels, Dieu merci, et nous savons bien que toutes nos bisbilles aboutissent à nous aimer à pleinsc coffres et par-dessus cœur et âme. Quant à moi je sais que mon avarice ne tient pas contre un de tes sourires et que je donnerais tous les viers coffres pour un seul de tes baisers.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16378, f. 110
Transcription de Frédéric Gillmann assisté de Florence Naugrette
a) « vrai ».
b) « bric-à-bracs ».
c) « plein ».