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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 février [1837], vendredi après midi, 1 h. ½

Bonjour mon cher adoré, bonjour.
Je viens d’être interrompue de près d’une heure par une effroyable colique s’il en fut. Heureusement qu’elle est un peu calmée.
Chère âme je vous adore, mon Toto chéri je vous aime, mon Victor je vous admire, avec des grands yeux je regarde les beaux dessins et je lis vos admirables vers qu’on dirait être faits l’un pour l’autre, ce qui est vrai au reste. Que je vous aime mon amour, que vous êtes grand mon Toto, que vous êtes bon et sublime, mon cher ange de la terre et du ciel.
Savez-vous mon pauvre amour que je ne me suis endormie qu’après six heures du matin, épuisée de fatigue des efforts que j’avais faitsa pour m’endormir. À neuf heures je me suis réveillée pour renvoyer ma fille à la pension. J’ai encore été un temps immense sans pouvoir me rendormir. Je ne sais pas ce que cela veut dire, mais c’est peu naturel et pas du tout amusant car lorsque vous n’êtes pas avec moi ce que j’auraisb de mieux à faire ce serait de dormir, il est vrai que je dormirais 12 mois de l’année sans interruption, ce qui serait une véritable léthargie, mais il faut ce qui faut dirait le grand [ ? ?] et je n’ai pas ce qui faut de vous ni de mon sommeil, je suis très [mal ?].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 125-126
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « fait ».
b) « aurai ».


3 février [1837], vendredi soir, 9 h. ¼

Mon Toto, mon amour, mon vieux oto, mon petit to, je vous n’aime. En rentrant chez moi j’y ai trouvé Lanvin que m’y attendait pour me remettre ma montre raccommodée et pour recevoir 10 F. que je lui ai donnés pour ce bon office.
C’était presque la moitié de votre encrier  ; avec quelle joie je me serais privée de la montre et de bien d’autres choses pour vous donner cette petite chinoiserie que vous fait envie. Vous êtes bien cruel pour votre pauvre Juju, lui refusant les moyens de vous faire de temps en temps une petite surprise, [ce] serait si gentil et ça vous coûterait si peu après tout. Tenez, vous êtes un vieux avare et une vieille bête, c’est dommage que je ne trouve pas d’autres épithètes pour [vous ?] mieux peindre, je l’emploierais.
Où êtes vous à présent ? je suis sûre que vous ne pensez pas à moi et que vous êtes en train de faire [COH ! COH ! COH ! ?] en étendant votre belle QUEUE EN éventail (style figuré pour exprimer l’homme qui fait le beau). Si je le croyais et si j’en étais bien sûre, là, de ces preuves, oh ! je vous la couperais si ras, si rasa, votre belle queue, qu’il ne vous serait pas facile de vous en servir d’ici à très longtemps, quand bien même toutes les [illis.] de la terre viendraient tourner au tour, mais j’ai la faiblesse de douter et voilà pour quoi je remets de jour en jour l’exécution de votre PANACHE au lendemain et que je vous donne un échantillon de la manière de piller et de pirater le style et les idées d’un homme qu’on est convenu d’appeler VICTOR HUGO. Connaissez-vous cela Victor Hugo ? Oui, et moi aussi, et moi aussi, et lui aussi, et nous aussi. Il y a de l’écho. Il paraît que nous le connaissons tous assez pour le voler à son nez et à sa barbe, je m’en vante et puis d’ailleurs il est assez [rien  ?] pour donner ce qu’on lui prend parce que ces petits cadeaux là n’entretiennent pas du tout l’amitié, ce qui fait que je vous aime encore et cent mille fois plus qu’avant et [illis.] baise le pan de votre redingote.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 127-128
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « si raz, si raz ».

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