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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 janvier [1842], jeudi après-midi, 1 h.

Bonjour mon Toto bien-aimé, bonjour mon pauvre Toto chéri ! Je te demande pardon de ma paresse qui est vraiment honteuse. Je te demande pardon aussi de fond du cœur de mon gribouillis d’hier qui était stupide et méchant. Pauvre ange bien-aimé, je voudrais baiser tes pieds. Comment vas-tu ce matin ? Et où en es-tu avec tes visiteurs et leurs inepties  ? Pourvu qu’ils ne t’en aient pas fait d’autres, pourvu que tu sois plus tranquille et plus content aujourd’hui qu’hier. Et moi qui attendais avec tant d’impatience l’apparition de ces deux volumes, me voilà rejetée, si non aux calendes grecquesa, du moins à bien loin si je compte d’après mon impatience ; si j’avais su, je me serais joliment régalée avec les bonnes feuilles que j’ai eu quelques jours CONFIÉES À MON HONNEUR [1]. Voime, voime, c’est fort bête l’honneur quand il vous empêche d’être heureux sans faire de mal à personne. Une autre foisb je vous en préviens je ne serai pas si discrète ni si honnête, je vous en préviens. Baisez-moi, mon cher petit adoré et songez à venir vous baigner les yeux avant d’aller à l’académie ou tout autre endroit si vous y allez.
Je t’aime, toi. J’espère que ma pauvre péronnelle [2] continue d’aller bien et je serais bien heureuse si je pouvais l’embrasser tout de suite à présent et te demander pardon de ma méchanceté d’hier. Jour mon cher petit o. Mme Guérard a envoyé chercher son compte hier par sa mère. Voici tous les créanciers du mois satisfaitsb, pauvre Toto bien-aimé, grâce à toi et à tes beaux yeux malades. Je t’aime, mon Victor, je t’adore, mon Toto.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16348, f. 33-34
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

a) « grecs ».
b) « autrefois ».


13 janvier [1842], jeudi soir, 6 h. ¼

Mme Franque sort de chez moi. Elle venait savoir des nouvelles de ma fille en son nom et en celui de sa sœur et aussi pour me faire des millions de compliments sur ce qu’elle a lu ces deux jours-ci de ton volume dans le journal La Presse. Il paraît que le Suquet en est comme fou, ce qui ne m’étonne pas et il y en a bien d’autres avec lui. Seulement tout cela ne me donne pas mon exemplaire à moi et je commence à trouver le temps long pour mon compte.
Bonjour cher bien-aimé. Bonjour cher bijou adoré. Bonjour toi. Je t’aime. Je n’ai pas encore de nouvelles de ma fille mais j’espère qu’elle va bien. Le bon Dieu ne voudrait pas m’attrister dans la joie de ton triomphe [3]. Aussi j’espère que ma pauvre péronnelle va bien et je suis heureuse de l’admiration que tu inspires à tout le monde parce que je crois que cela te rend heureux aussi un peu. Je t’aime moi, mon Victor, c’est plus que t’admirer, c’est tout à la fois. Je voudrais bien savoir si la bévue des brochures est enfin réparée et si on ne laisse pas de nouveau chômer la vente. Mais surtout, je voudrais te voir pour te voir, pour te regarder, pour t’écouter, pour m’enivrer, pour t’adorer et pour t’aimer avec tous mes yeux et toute mon âme. Baise-moi, mon cher Toto, baise-moi, mon amour adoré. Je t’aime. Prends garde aux glaces dans la rue et reviens bien vite auprès de moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16348, f. 35-36
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Une partie du Rhin vient de paraître.

[2Sa fille Claire.

[3Une partie du Rhin vient de paraître.

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