9 janvier [1842], dimanche soir, 4 h. ¼
L’onglée, l’onglée aux mains et aux pieds, mon amour, et je vous écris malgré cela parce que je veux vous tirer les oreilles (moralement parlant) pour vous apprendre à venir si souvent chez moi me déranger de ma contemplation. Ia ia, monsire, matame, il est son sarmes mais tu mériterais bien une bonne pile que tu n’aurais pas volée pour l’absurde vie que tu me fais mener. Si je te tenais, je ne te l’épargnerais pas. Il faut espérer que [Mamzelle Caroline Juto ?] sera retournée chez toi ce matin et que tu lui auras donné audience séance tenante au lit ? Je l’espère et je le DÉSIRE. Bien entendu, prends garde de la perdre, scélérat. Est-ce aujourd’hui que ton livre paraît ? Je le réclame à grands cris. Au moins il me tiendra compagnie puisque vous ne voulez plus absolument payer de votre AIMABLE personne. Après, ça sera toujours la même chose, vous n’en continuerez pas moins votre travail et moi, je continuerai de rager avec un nouvel acharnement. Hélas ! Quand serons-nous au mois de juin ? Par exemple, il n’y aura ni prétexte, ni travail, ni Dieu, ni Diable, il faudra monter en diligence avec moi, je vous tuerais plutôt. Mais d’ici là que d’onglées et de journées noires et tristes à passer. D’y penser, j’en suis épouvantée et découragée, mais je vous aime, je t’aime, mon Toto.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16348, f. 23-24
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette