Paris, 12 juin [18]72, mercredi matin, 8 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé, comment vas-tu ce matin ? Je crains que ta nuit ne se soit un peu trop ressentie des fatigues et des agitations de ton festival et que tu n’aies pas bien dormi. Quant à moi, je me suis couchée de guerre lasse à 11 h. ½ mais je ne me suis endormie qu’à une heure du matin. J’espérais que peut-être je t’entendrais rentrer, soit en voiture soit reconduit par quelques uns de tes amis. Hélas, j’en ai été pour mes frais d’oreille et de cœur. L’important est que tu sois content de ta soirée, y compris du dîner. Quant à moi, j’ai profité de ton festival pour me livrer à un fort pot-au-feu. Puis je suis allée chez Louis [1] qui n’était pas chez lui. J’ai trouvé sa petite femme dans son lit et mieux que je ne l’espérais. Toute la petite marmaille était endormie. L’aînée, en proie à une bronchite, avait de forts accès de toux et parlait pendant son sommeil. Somme toute, je ne crois pas qu’il y ait rien d’inquiétant, ni pour la mère ni pour les enfants. J’étais rentrée à dix heures. Tel est par le menu le compte rendu de ma soirée. À ton tour maintenant de me faire le tien. En attendant je t’adore de confiance.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 164
Transcription de Guy Rosa