Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1839 > Novembre > 25

25 novembre [1839], lundi après-midi, 1 h. ½

Bonjour, mon petit bien-aimé. Bonjour, mon adoré. Je suis bien souffrante, va. J’ai cru que je ne pourrais pas me lever aujourd’hui, la tête me fait bien mal et puis j’ai un malaise général. Cependant je suis debout, j’ai fait tes tisanesa. Je t’aurais écrit depuis longtemps si je n’avais pas eu la visite de la propriétaire accompagnée de sa petite fille. Elle venait savoir si j’étais contente du portier ; c’est une visite et une bavette de formalité qu’elle accomplit envers tous les locataires mais qui m’a été fort insipide tout à l’heure car je souffrais beaucoup et j’avais hâte de t’écrire. Je suis vraiment bien souffrante et peut-être me recoucherai-je tout à l’heure. Je t’aime, mon Toto. Je t’aime, mon petit bien-aimé. J’ai besoin de te voir, j’ai besoin de tes yeux, j’ai besoin de ta voix, j’ai besoin de ton souffle pour vivre car sans tout cela il n’y a pour moi ni soleil, ni bruit, ni air, je suis dans un cachot dans lequel mon amour se heurte et se blesse du matin au soir. Je souffre ce matin plus qu’à l’ordinaire. Est-ce le physiqueb qui influe sur le moral ou le moral sur le physiqueb  ? C’est ce que je ne saurais dire mais je sais que je suis bien grognon et bien malade ce matin. Si vous étiez venu déjeuner ce matin tout cela n’aurait pas lieu et je serais très joyeuse et très bien portante. C’est donc votre faute et vous êtes un vieux méchant et une vieille bête que j’aime et que j’adore. Baisez-moi et venez tout de suite si vous avez du cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16340, f. 89-90
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « tisanne ».
b) « phisique ».


25 novembre [1839], lundi soir, 6 h. ¼

Merci, mon cher adoré, merci, tu as été bon comme toujours et moi méchante comme à l’ordinaire, ce qui est on ne peut plus juste. Baisez-moi. Je suis folle, j’ai la tête comme une cloche en branle. Je ne me connais plus. La mère Pierceau a pris un bain de pied, elle va te faire refroidir un bouillon que tu auras la délicatesse de ne pas prendre. Moi je t’écris pendant ce temps-là et je t’aime comme un pauvre chien malade. Je viens de donner 1 franc à la mère Pierceau pour faire acheter divers COMESTIBLES dont je bourrerai mon petit torse jusqu’au [illis.]. Cependant il est probable que je ferai honneur à votre souper. Jour, mon petit homme, jour, mon adoré. Je vous aime. Il fait joliment froid chez la mère . Je suis très contente de tes deux petites lettres pour ces deux messieurs [Matignon  ?] et [Delafont  ?] : elles sont charmantes et vous ressemblent comme deux gouttes d’encre. Je suis très contente en outre que tu ne perdes pas les 500 francs de Granier. J’aime mieux que tu les aies dans ton escarcelle que dans celles des créanciers du susdit. Enfin tout est pour le mieux et si tu pouvais revenir très tôt, très longtemps et très souvent, je serais ravie. Le papier de Mme Pierceau est très petit, il faudra que j’en apporte de gigantesque pour les jours où je suis chez elle parce que je veux avoir mes coudées franches quand je vous écris que je vous aime et que je vous adore. Si ça ne vous convient pas vous n’avez qu’à me le dire. Je vous laisse le choix des ARMES et vous savez mon heure et mon adresse. Baisez-moi et aimez-moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16340, f. 91-92
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne