Guernesey, 2 mai [18]70, lundi matin, 6 h. ½
Bonjour, mon adoré béni, que le bonheur soit avec toi comme mon amour, voilà ce que je demande à Dieu matin et soir. Comment ta nuit ? Aussi bonne que la mienne, je l’espère. Tu fais bien de ne pas monter encore sur ton toit [1] car les matinées sont vraiment trop frisquettes. La pauvre Suzanne, elle aussi, souffre de la gambe [2], depuis le tour de la cheville jusqu’à la hanche, ce qui la fait boiter jusqu’à terre. Pour peu que cela s’étende davantage, ma maison ressemblera à celle de Bartholo [3] où tout le monde, bêtes et gens, étaita en proie au même mal. Heureusement que tu songes à nous donner pour cet hiver des bonnes douches de soleil [4], panacée supérieure, j’en suis sûre, à ton hydrothérapie glacée. Seulement, je crois que la sagesse serait de partir pas trop tard, pour cette terre promise de la santé, car la Suisse n’est pas tendre à traverser dès le mois de septembre. Maintenant que j’ai fait mon petit bourdonnement c’est à toi de lancer ton coche quand et comme tu voudras. Moi je t’aime je ne sors pas de là.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 123
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette
a) « étaient ».