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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 13 août 1860, lundi matin, 7 h.

Bonjour, mon ineffable bien-aimé ; bonjour, amour, santé, bonheur. Voilà ce que mon cœur te souhaite ce matin et à tous les instants de ma vie. Comment as-tu passé la nuit, mon cher adoré ? Tu me le diras tantôt. En attendant voilà un bateau tout pavoisé et musique à bord qui s’en va, non pas T’EN guerre, mais pour quelque trip voisin. Bon voyage, amusez-vous bien, moi je reste avec mon cher petit homme sur le plancher des Guernesiais. à propos Suzanne a retrouvé le joli petit papillon par terre près de son fourneau [1]. Je l’ai relevé et placé sur un lit de fleursa posé sur ma table d’où je le regarde tout en t’écrivant mais le pauvre petit paraît être dans une complète léthargie ; je crains même qu’il n’en sorte plus jamais. C’est son sort et nous n’avons aucun reproche à nous faire. Peut-être s’est-il offert de lui-même à nous pour fixer le souvenir de notre charmante promenade d’hier. Tu vois que dans tous les cas tu peux le garder sans scrupule et sans remords car nous avons tout fait pour le conserver à la liberté et à la vie. Je crains seulement qu’une partie de la beauté de son PLUMAGE ne disparaisse dans la mort. Déjà ce matin je le trouve très terni et très effacé mais il n’en restera pas moins un des plus aimables et des plus doux souvenirs de nos petites promenades intimes. J’ai déjà regardé mon beau portrait [2] ce matin et je l’ai baisé des yeux et de l’âme en attendant que je baise mon cher petit ORIGINAL en chair et en os.

BnF, Mss, NAF 16381, f. 213
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Victor Hugo inscrit lui aussi une note dans ses carnets à propos de cet animal : « le joli papillon trouvé par moi le 12 a passé trois jours chez JJ. fenêtres ouvertes, sans vouloir s’envoler. Elle l’a trouvé mort dans l’huile de sa veilleuse ce matin 16. » Le 16 août, il note : « mort du papillon ». (CFL, t. XII, p. 1340.)

[2Juliette possède plusieurs portraits de Hugo qui lui a donné une photographie de lui prise par Mullins à Jersey le 18 juin 1860. En ce moment, les photographes Leballeur et Auzou font une enquête photographique sur Hauteville House.

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