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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 novembre [1835], dimanche matin, 9 h. ½

Que veux-tu que je te dise après ce qui se passe tous les jours ? Veux-tu que je sois gaie et contente ? Mais je ne t’aimerais pas si j’étais ainsi, malgré tes absences de jour en jour plus longues. Je suis triste parce que je t’aime. Je suis malade et impatiente parce que je t’aime. Je suis inquiète et malheureuse parce que je crois que tu m’aimes moins qu’autrefois. Si tu ne comprends pas cela, tu ne comprends plus l’amour, et je n’en reste que plus triste et plus malheureuse.
Pour que rien ne manque à ma félicité, j’ai de plus l’inquiétude de savoir si tu n’es pas souffrant et si tes douleurs d’entrailles n’ont pas eu de suite.
Je ferai ma lettre très courte car je sais que tu ne veux pas que je me plaigne, c’est-à-dire que tu ne veux pas que je sente. Ainsi, à quand tu pourras, mon cher bien-aimé. Je t’aime, je t’aime de toute mon âme.

Juliette

11 h. ¼. Je reprendsa ma lettre pour te dire que je ne suis pas fâchée contre toi, que je pense que peut-être tu as été retenu chez toi par les soins qu’il aura fallu donner à ce pauvre cher petit Toto [1], que j’aime autant que le grand. Pauvre cher petit ange, tu as bien fait de prendre sur la part de mon bonheur pour le dorloterb et le guérir de son bobo que je baise tout doucement.

J.

Adresse :
À mon cher bien-aimé.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 96-97
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « je reprend ».
b) « dorlotter ».


8 novembre [1835], dimanche soir, 8 h. ½

Mon cher bien-aimé, je ne t’en écrirai pas très long parce que j’ai un mal de tête absurde. Mais je voudrais résumer dans le peu que je vais t’écrire toute mon âme, tout mon amour. Je voudrais avec ce mot-là : je t’aime, te faire oublier tout le chagrin que je t’ai fait et que je me suis fait depuis 3 jours. Oui, nous nous aimons. Oui, nous resterons ensemble jusqu’à notre dernier soupir. Oui, tu m’aideras et tu feras de moi une femme à l’abri de la misère et de la prostitution. Oui, tu me rendras ce que j’étais avant ma chute, une honnête femme, et de plus, une bonne mère. J’ai confiance, j’ai espoir, je t’aime.

Juliette

Baise bien notre pauvre petit homme et permet-lui de pleurer un petit peu sans même marcher sur ses chers petits boyaux.

[Adresse]
À mon cher petit bien aimé mari

BnF, Mss, NAF 16325, f. 98-99
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Surnom de François-Victor Hugo.

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