Paris, 10 avril 1881, dimanche matin, 7 h. ½
Vivat, mon grand adoré, tu as eu, sans aide d’aucune sorte, une très très bonne nuit, Dieu en soit loué et béni ! Moi, aussi, j’ai eu, comme toi, une très bonne nuit dont la meilleure partie a été empruntée à la tienne, ce dont je te suis très reconnaissante. Cela me permettra d’entrer gaiment dans mes soixante-seize ans demain. J’espère que la santé de notre chera Petit Georges [1] ne s’opposera pas à cette petite vieille joie, peut-être la dernière de ma vie. Je le désire pour lui, pauvre enfant, dont la souffrance a commencé trop tôt ; et je le désire pour toi et pour tous ceux qui l’aiment comme moi. Je n’ai pas encore de ses nouvelles mais je souhaite ardemment qu’ellesb soient selon ton cœur et le mien.
Il fait très beau et très doux ce matin, ce qui te permettra peut-être de sortir en temps utile et pendant le soleil. Pour cela il faudrait te lever un peu plus tôt et t’astreindre à écouter la lecture des lettres par le bon Lesclide.
Tu as un fort arriéré dont tu devrais tâcher de te débarrasserc aujourd’hui en même temps que trente portraits à signer, envoyés pour les ordonnateurs de la fête [2] par le brave Carjat. Tout cela urge, urge, urge, à cor et à cri comme mon cœur.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 74
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « chère ».
b) « quelles ».
c) « débarasser ».