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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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15 mai 1839

15 mai [1839], mercredi matin, 11 h. ½

Bonjour mon cher petit homme, bonjour, mon bien-aimé. Qu’est-ce qui vous a empêché de venir ce matin ? Vous travaillez, je sais cela, mais vous prenez aussi quelques heures de repos et ce sont celles-làa que j’envie à votre lit, auquel vous donnez la préférence sur le mien qui ne lui est pourtant pas inférieur. J’ai envoyé, comme tu sais, chez Mme Pierceau pour mes robes et pour le VACCIN. Mme Pierceau a dit qu’elle m’avait attendue hier et que si je n’y allais pas cette semaine elle ne viendrait pas dimanche. À son aise, mais ce qu’il y a de sûr, c’est que je n’y retournerai pas de sitôt. J’ai toujours ma douleur dans la nuque et le dos, ce qui m’empêche de remuer la tête et ce qui ajoute aux charmes de mon individu. Le temps est remis au beau, sinonb à la chaleur, c’est déjà une amélioration dont nous ferons bien de profiter aujourd’hui en allant nous promener. C’est si bon de respirer avec toi et de s’appuyer sur ton bras que tous les autres plaisirs du monde, sans toi, ne sont que des corvées plus ou moins ennuyeusesc. Je t’aime, mon Toto. Je t’adore, mon petit homme. Baise-moi et viens me voir aussitôt que tu pourras. Je crois que tu feras bien de mettre Mlle Didine aux prises avec ses 21 francs par mois : si elle s’en tire à son honneur, ce sera une très bonne méthode et que j’appliquerai à ma Claire. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 167-168
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « celle là ».
b) « si non ».
c) « ennuieuses ».


15 mai [1839], mercredi soir, 6 h. ½

Tu ne t’es pas aperçua, mon adoré, que tu coudoyais Lanvin en sortant de chez moi. Je t’ai fait signe comme tu détournais le coin de la rue mais tu n’as pas compris. Au reste, il venait pour essayer ses forces car depuis le jour où il a reconduit Claire à la pension, il a été trop malade pour continuer son service au théâtre. Il venait savoir si j’avais des reconnaissances ce mois-ci et s’il fallait amener Claire pour ma fête. Je lui ai donné mes instructions pour les deux choses ; du reste sa pauvre femme est toujours dans le même état et ses deux enfantsb ont la rougeole. Il est impossible d’arrêter sa pensée sur la misère et le malheur de ces pauvres gens-là. Je lui ai donné la robe de mousseline de laine DE COTON puisque tu me l’avais permis, c’est un peu de joie et de bien-être pour la pauvre misérable malade, et quant à moi, ce n’est même pas une bonne action, attendu que je ne l’aurais pas remise. Je t’aime, mon Toto. Je t’adore, mon petit homme. Et ton cher petit portait, quand l’aurai-je ? Je ne t’en parlais pas, espérant que cela me porterait bonheur et que je l’aurais plus tôtc mais je vois que ma discrétion n’est pas récompensée, et je m’insurge. Je crie : « MON PORTRAIT, MON PORTRAIT, JE VEUX MON PORTRAIT TOUT DE SUITE. » Je t’aime. Vous devez me bénir dans ce moment-ci car votre chère petite figure doit se trouver comme dans du beurre.

BnF, Mss, NAF 16338, f. 169-170
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « apperçu ».
b) « enfans ».
c) « plutôt ».

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