22 mai 1881

Paris, 22 mai 1881, dimanche midi

Cher bien-aimé, je ne sais rien encore de ta nuit, si ce n’est que tu dormais à 2 heures du matin et à six heures et demie quand je me suis levée. Cela ne prouve pas absolument que tu aies passé une bonne nuit, cela prouve seulement que tu dormais à ces moments-là. Tout à l’heure j’irai m’en informer en t’embrassant de toutes mes forces. En même temps je te porterai une lettre de M^me Chenay qui en contenait une petite pour moi à l’occasion de ma fête, qui est aussi la sienne [1]. Puis un mot très pressant de M^me Amet d’Abantès [2] pour être reçue par toi aujourd’hui même de deux à trois heures, ce que j’ai cru devoir accorder pour toi à travers la plume de Lesclide.
Cher adoré, si je m’écoutais je t’aurais écrit une lettre encore plus longue que celle d’hier pour te remercier à nouveau de ton adorable petite lettre et de ton aimable et tendre petit toast du soir [3]. Mais il ne faut pas abuser vis-à-vis de toi-même des meilleures choses et je me rationne à ceci : je t’adore.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16402, f. 111
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette