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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 15 décembre [18]63, mardi matin, 8 h. ½

Bonjour et rebonjour, mon doux adoré, comment as-tu passé la nuit ? Si j’en juge d’après ta pantomime extrêmement joyeuse tu te portes bien ce matin et tout est à souhait pour la sécurité de mon bonheur. J’espère ne pas me tromper et que tu me le confirmeras tantôt quand je te verrai. En attendant je penserai avec pitié à l’aventure déplorable de ce pauvre Kesler, du reste, à part la crise douloureuse qu’il a euea hier soir à table, il fait très bonne contenance et il paraît convaincu qu’il a échappé à un malheur certain et incommensurable en n’épousant pas cette médiocre coquette guernesiaise [1]. Quant à moi je me félicite de n’avoir jamais eu aucune relation de près ni de loin avec cette demoiselle plus que déraisonnable. Maintenant je souhaite à ce pauvre Kesler de ne pas se laisser abattre par ce dénouement brusque de toutes ses illusions et de tourner ses espérances du côté du travail et de la sagesse. Quant à nous, mon adoré bien-aimé, remercions Dieu de nous laisser l’amour jeune que nous avions il y a trente ans sans qu’aucun de nous puisse le reprocher à l’autre comme une aberration ridicule et contre nature.
J’espère que cette fois ce sera bien demain mercredi que ton Shakespeareb fera son entrée chez moi. Il y a si longtemps que je le désire et que je l’attends qu’il serait cruel à lui de manquer encore une fois de parole. D’ailleurs qui veut la fin veut les moyens et puisque vous voulez que je ne m’occupe pas de mon ménage il faut absolument que vous occupiez vous-même mon loisir. C’est à vous de choisir, quant à moi cela ne me regarde pas et je m’en lave les pieds et les mains. Je ris avec toi, mon cher petit homme, parce que j’espère que tu as bien [une ligne illisible] tu m’aimes.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 283
Transcription de Gérard Pouchain

a) « eu ».
b) « Shaskepeare ».

Notes

[1Le projet de mariage de Kesler avec Marie Vaucour n’a pas abouti. « 9 h. du matin. Rupture de Mlle M. V. avec K. J’ai en ce moment sous les yeux, arrêtée devant la porte de la maison V., la voiture chargée de malles qui va emmener Miss V. Elle part, dit-on, pour le Canada. 9. h. ¼ elle est partie. « (Agenda de Victor Hugo, 14 décembre 1863)

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