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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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15 décembre [1844], dimanche après-midi, 1 h. ¼

Cher adoré bien-aimé, tu es sans doute épuisé de fatigue puisque tu n’es pas venu et que tu as passé la nuit auprès de ce pauvre vieillard [1] ? Je te plains, mon pauvre adoré bien-aimé, et je t’aime plus que jamais de toutes mes forces et de toute mon âme. Je t’écris bien tard mon Toto chéri et cependant je suis levée depuis neuf heures mais comme je voulais envoyer Claire chez son père je l’ai fait déjeuner de bonne heure et puis j’ai fait ta tisanea et tous les triquemaques qui en dépendent avant de t’écrire. Mais tu sais bien que je ne pense qu’à toi et que je ne désire que toi au monde. J’ai dû envoyer Claire chez son père une seconde fois parce qu’il l’en avait priée hier et qu’elle paraissait le désirer extrêmement. Il paraît que son père est dans un abattement extrême. Il désirait que tu lui rendisses le service d’écrire à M. Debelleyme avant qu’il n’aille le voir pour tâcher d’obtenir que sa femme n’aille pas en prison [2]. Tu verras ce que tu auras à faire en cette triste circonstance. Pour ma part je te serai obligée de faire tout ce qui dépendra de toi pour adoucir et pour amortir la chute de tous ces gens-là. Toutefois, cependant, que cela ne te répugnera pas. Pauvre adoré, tu es la providence des fous et des pères, toi. Tu es mon amant sublime et bien-aimé à moi dont je baise la bouche et les pieds. Je te désire et je t’attends mon cher bien-aimé avec toute l’impatience dont je suis capable, trop heureuse si tu viens tout à l’heure et si tu n’as pas souffert.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16357, f. 153-154
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette

a) « tisanne ».

Notes

[1Victor Hugo veille son beau-père malade.

[2Louise d’Arcet, épouse de James Pradier, a fait l’objet le 11 décembre d’un constat en flagrant délit d’adultère qui devrait la conduire en prison. Le 18, Hugo écrit à Debelleyme en faveur de Pradier, « qui est un des plus admirables sculpteurs qu’ait eu la France et dont le nom n’est prononcé en Europe qu’avec la profonde estime qui s’attache à un merveilleux talent […] M. Pradier voudrait vous entretenir d’une affaire douloureuse et grave pour laquelle il espère que votre haut et généreux appui ne lui manquera pas. » [Douglas Siler, ouvrage cité, t. III, p. 105.)

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