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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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14 juin [1836], mardi matin, 9 h.

Bonjour ma joie, bonjour ma vie, bonjour mon âme. Quoique je ne t’aie pas encore vu ce matin, je ne suis pas aussi malheureuse qu’hier parce que le MOMENT où nous serons ensemble tout à fait APPROCHE.
J’ai peu dormi cette nuit et j’ai beaucoup souffert. Mais malgré cela je suis beaucoup mieux qu’hier et serai toute prête à partir à l’instant-même si tu étais prêt.
Je t’aime, mon cher Victor, non pas comme on aime ordinairement, mais comme on aime quand le cœur, la pensée, la vie, l’âme, tout est pris.
J’ai beaucoup à faire aujourd’hui et beaucoup à écrire, ce qui m’ennuie fort. Je voudrais être partie pour toutes sortes de raisons dont la plus GROSSE c’est votre possession, mon cher petit Toto chéri. Il me tarde d’entrer dans tous mes Droits.
J’espère que malgré tes occupations et l’inquiétude que tu avais hier, mon cher petit homme, tu auras pris quelque repas cette nuit. J’attends avec bien de l’impatience que tu viennes. Mon cher adoré, j’ai tant de pardons à te demander, tant d’amour à te donner que tu ne sauras où le mettre. Je t’aime mon pauvre petit. Je baise vos petites pattes.

J.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 162-163
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette


14 juin [1836], mardi soir, 11 h. ¾

Je t’écris pour la dernière fois du moins d’ici à un grand mois.
QUEL BONHEUR !
Ce n’est pas que je n’aie bien du plaisir à vous écrire, mon cher Toto adoré. C’est même le seul que j’aie quand je ne vous vois pas. Mais à côté de celui de demain, d’après demain et des autres jours, ce bonheur-là est un malheur.
Depuis que tu m’as quittée, j’ai mis nos comptes à jour. J’ai fait un dernier rangement, et puis enfin je vais me coucher. Je crois que je dormirai peu, je n’en serai que plus vite habillée.
Pauvre cher petit homme chéri, tu ne seras pas triste en route, n’est-ce pas ? Tu ne seras pas trop préoccupéa, tu ne regrettes pas le bonheur que tu me donnes et les sacrifices qu’il te coûte, n’est-ce pas mon adoré ? Quand je te vois triste comme ça, je sens mon cœur se serrer et puis je ne peux plus avoir de plaisir à rien. Car vois-tu, mon cher bien-aimé, ma joie, mon bonheur, mon plaisir, mon amour, je ne les prends que dans ton sourire. Ainsi ne sois pas triste ni morose et tu seras bien heureux et moi aussi. Jusqu’à ce que je vous voie je baise vos mains et vos pieds en pensée.

J.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 164-165
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « préocupé ».

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