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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 avril 1849

3 avril [1849], mardi matin, 8 h.

Bonjour, mon adoré petit Toto, bonjour, mon cher amour, bonjour je vais mieux. J’ai encore eu une crise d’entrailles à 2 h. du matin mais depuis je me sens beaucoup mieux. Je resterai une partie de la journée au lit et puis tout sera fini. Demain, je l’espère, il ne sera plus question de rien. Mais toi, mon cher petit homme, comment vas-tu ? À quelle heure es-tu rentré et quel souper as-tu fait ? Si j’avais pu prévoir que tu mangerais chez moi hier je t’aurais fait un vrai dîner mais j’étais loin de m’attendre que tu me ferais cet honneur et ce bonheur. Toujours est-il que me voilà très vexée de t’avoir si mal traité quand j’aurais été si heureuse au contraire de te remplir de bonnes choses. Il faudra me rendre très prochainement l’occasion de prendre ma revanche. En attendant, je vais me dépêcher de remettre mon ventre en état pour te tenir dignement tête à table et ailleurs. C’est à cette intention que je m’impose aujourd’hui le sacrifice de ne pas t’accompagner pour ne pas retarder d’un jour ma complète guérison mais que je te remercie encore une fois pour la douce surprise que tu m’as faite hier au soir. Rien ne peut exprimer le bonheur que tu me donnes quand tu viens de toi-même auprès de moi sans y être attendu, mais non sans être désiré, car toutes les aspirations de mon cœur sont toujours tournées vers toi. Mon Victor adoré, mon amour, ma joie, mon bonheur, et mon tout, sois béni pour cette bonne pensée.

Juliette

MVHP, MS, a8178
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine.


3 avril [1849], mardi matin, 11 h ¾

Je vais me lever, mon cher petit homme, parce que je sens que le séjour prolongé du lit ne me vaut rien pour la tête. D’ailleurs depuis cette nuit je suis parfaitement tranquille. Ce matin j’ai commencé mon régime homéopathique, donc tout cela ira bientôt comme sur des roulettes ; il ne manquera que vous, pour que la chose soit parfaite. Peu de chose en vérité et qui ne mérite pas qu’on s’y arrête, voime, voime. En attendant Jourdain est revenu tout à l’heure pour savoir comment il fallait doubler ton coussin mais au fond pour tâcher d’avoir un peu d’argent. Ce que voyant je lui ai promis 100 F. pour le jour où il rapporterait le susdit coussin, c’est-à-dire pour demain ou après-demain. Mais ce n’est pas là ce qui me chiffonne pour le moment, c’est l’ennui de ne pouvoir pas te conduire à l’Assemblée. Cela fera deux jours. Vous ne vous en apercevez pas, vous, si ce n’est pour vous en féliciter et pour regarder les jarretières des femmes. Que je vous y prenne et puis vous verrez de quelle trique je me mouche. Profitez de votre reste, s’il en reste encore et dépêchez-vous parce que demain je reprends mes fonctions de garde du corps et je vous escorte de force à votre Assemblée nationale, que la république confonde et réciproquement toutes les deux ensemble. Tâchez de venir tout à l’heure si vous ne voulez pas que je sois très malade ce soir. D’ici là je vous adore et je vous baise à outrance.

Juliette

MVHP, MS a8179
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine

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